La pyrale du buis vit-elle son dernier printemps ? Le 3 mai, la DGAL a autorisé la société M2i Life Sciences à commercialiser le Box T Pro Press, produit de confusion sexuelle contre la pyrale du buis. Cet arme anti-cydalima perspectalis, nom latin de ce papillon débarqué en France en 2007, est constitué d’un applicateur à air comprimé réutilisable et de micro-capsules de phéromones.
M2i Life Sciences assure « qu’un jardinier peut traiter un hectare de buis en deux heures ». On connaît le principe de la confusion sexuelle : les phéromones reproduites par l’homme empêchent les insectes mâles et femelles de s’accoupler et/ou permettent de les piéger. C’est l’espoir de ne plus revoir les papillons blancs proliférer en 2020.
Le plan Ecophyto II+ forcé de réussir
Sauver les buis du parc de Versailles n’est pas le principal atout du biocontrôle. C’est une des alternatives les plus prometteuses aux pesticides de synthèse. L’ensemble des méthodes basées sur des mécanismes naturels, le biocontrôle (phéromones, gestion des agresseurs pour éradiquer les nuisibles…), est au cœur d’Ecophyto II+, qui prévoit la réduction de moitié de l’utilisation des produits conventionnels d’ici à 2025. Ce mois-ci, un premier appel d’offres est lancé dans le cadre du programme d’investissements d’avenir (PIA3) doté de 30 millions d’euros.
Après les échecs des précédents plans, le gouvernement et les agriculteurs se retrouvent dans le viseur des médias et plus largement de l’opinion publique. La Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles, FNSEA, a d’ailleurs lancé l’année dernière son contrat de solutions afin de limiter l’usage des produits phytosanitaires.
En partenariat avec la recherche publique, des PME comme M2i Life Sciences ou De Sangosse… et des géants tels que le groupe InVivo à travers sa filiale Biotop, ou encore BASF, sont à l’offensive pour se positionner sur un marché du biocontrôle français estimé en 2017 à 140 millions d’euros. Ce n’est que 5 % du marché des produits phytosanitaires, mais cela correspond à une croissance annuelle de 25 %*.
Une autre chimie ?
Les enjeux sont considérables et les acteurs très proches du monde de la chimie. En témoigne M2i Life Sciences qui a fait l’acquisition de l’ex-usine Solvay à Salin-de-Giraud (Bouches-du-Rhône). Les dirigeants Philippe Guerret (Edhec) et Olivier Guerret (polytechnicien) possèdent une solide expérience dans l’industrie chimique. Créée en 2012 la société est déjà présente dans plus de 25 pays avec un catalogue de 60 phéromones. M2i a mis au point un système de micro-encapsulation brevetée jusqu’en 2035. « Cette technologie de rupture permet une diffusion régulière et de longue durée, argumente Christian Le Roux, secrétaire général chez M2i. La phéromone est sélective et ne perturbe pas les autres familles d’insectes. La toxicité est nulle. Il n’y a pas de résidu dans le sol. »
La PME parisienne a de grandes ambitions : des dossiers ont été déposés pour la vigne auprès de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) pour une homologation fin 2019 en France. Quant aux vergers et grandes cultures, les demandes d’homologation seront soumises en 2020 pour la France et l’Europe. Hors Europe, les homologations pour des solutions de lutte biologique par phéromones pulvérisables seront soumises en 2019 pour un agrément accordé fin 2019 voire même mi-2020.
De fait, M2i compte sur une croissance internationale. Être présent en Amérique du Sud par exemple est l’assurance de lisser l’activité sur toute l’année. L’objectif est bien de devenir « un petit leader Mondial », selon l’expression de Christian Le Roux.
* Source : IBMA France, International biocontrol manufacturers association.
Marie Nicot