Insolites et élégantes, les serres des frères Clément, cultivateurs à Saint-Raphaèle-lès-Arles (Bouches-du-Rhône), surprennent par leur armature high-tech. Ce sont des éco-serres fermées où les plants de tomates s’élèvent comme des lianes à partir d’un substrat composé de tourbes, de roches volcaniques et de fibres de coco.
Pas de nuisibles dans les serres
À l’intérieur, la température oscille entre 20 et 25 °C et le taux d’humidité ne dépasse pas 80 %. Cela suppose de chauffer en énergie renouvelable l’hiver et de rafraîchir aux heures chaudes. Sélection des variétés de tomates fraîches, assemblage des éléments de la serre importés pour l’essentiel des Pays-Bas, dosage de l’eau et des nutriments… Dany, l’aîné, et son cadet Vincent peaufinent cette « rupture technologique » depuis 2010.
Au départ, ces fils de maraîchers ont travaillé en serres traditionnelles. Mais ambitieux, patients et volontaristes, ils ont investi dans l’éco-serre : « C’est une révolution qui permet de fournir un marché de masse avec des produits garantis zéro résidu de pesticides. Nous ne traitons pas puisque les nuisibles n’entrent pas en contact avec les tomates. Nous recourons seulement au biocontrôle. Il s’agit de satisfaire le besoin en produits sains et savoureux. C’est de l’intensif durable : nous ne transmettons pas de nitrate dans le sol. »
Le laboratoire Capinov est en charge des contrôles
Comme près de 200 producteurs provençaux et catalans fédérés en organisation de producteurs, les Clément commercialisent leur production sous la marque Rougeline créée en 1990. La société gère le marketing pour s’adapter aux exigences du marché et de la distribution. Cette année, elle revendique haut et fort sa volonté d’ouvrir une troisième voie entre culture conventionnelle et bio.
Un sticker vert pomme indique sur les barquettes que les tomates sont garanties « zéro résidu de pesticides – inférieur à la limite de quantification pour plus de 220 substances actives analysées sur les fruits ».
Un logo complexe à décrypter pour les néophytes. Privés du label AB en raison de la méthode de culture hors sol, les paysans de Rougeline se lancent dans une pédagogie de longue haleine. Il leur faut expliquer la nature des contrôles effectués par le laboratoire Capinov, certifié Cofrac, instance qui délivre les accréditations aux organismes évaluateurs.
La mission est d’autant plus complexe que les tomates coûtent en moyenne 30 % plus cher que leurs concurrents standards. De plus, Rougeline, qui ne peut investir des millions d’euros en communication de masse, doit miser sur les médias, son site, les réseaux sociaux et les journées portes ouvertes.
Néanmoins, l’objectif reste de mettre sur le marché 20 000 tonnes de tomates et 400 tonnes de fraises. D’ores et déjà, les enseignes Carrefour, Intermarché, Monoprix, E. Leclerc, Lidl et Auchan ont confirmé leur accord pour commercialiser tout ou partie de la gamme cette année.
Le Smart Farming s’attaque aux mauvaises herbes
La chambre d'agriculture de la Somme mène un projet ambitieux : la télédétection des adventices. Objectif : repérer les mauvaises herbes grâce à leurs empreintes spectrales, c'est-à-dire via le rebondissement de la lumière sur leurs feuilles.
Accompagnée du pôle d'enseignement Yncrea de Lille, et de l'Imec, entreprise belge qui fournit la caméra, la chambre d'agriculture se donne plusieurs années avant d'aboutir.
Selon Jérôme Cipel, chef de projet, « L’idée est d’analyser les empreintes spectrales de multiples plantes grâce à une caméra sophistiquée puis de stocker toutes ces informations. »
Pour remplir sa mission, l'équipe de Jérôme Cipel doit rechercher les différentes longueurs d‘ondes de chaque végétal pixel après pixel. Puis créer des algorithmes pour localiser et qualifier les adventices. Le jeu en vaut la chandelle : cibler les désherbages permettra de réduire l'usage d'herbicide.
Alexandre Eschwege