Le changement climatique menace-t-il la sécurité alimentaire? FAO, Vincent Gitz.

20 juin 2011 - La rédaction 
Quel pourrait être l'impact du changement climatique sur la sécurité alimentaire ? Cette question préoccupe la communauté internationale. Alors que la réunion de Bonn sur le changement climatique s'est achevée le 17 juin, le panel d'experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition (HLPE) lance une consultation publique dans le cadre de l'étude sur changement climatique et sécurité alimentaire*.
Entretien avec Vincent Gitz, coordinateur du panel d'experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition.

Campagnes et environnement : Le changement climatique menace-t-il la sécurité alimentaire ?

Vincent Gitz : Il faut d'abord rappeler que la sécurité alimentaire n'est pas assurée. Près d'un milliard d'être humains sont sous-alimentés, auxquels s'ajoute un autre milliard de mal nourris à qui il manque des micronutriments essentiels. Pour répondre à la demande croissante, à horizon 2050, surtout dans les pays en développement, la FAO estime qu'il faudra produire

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Vincent Gitz, coordinateur du panel d'experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition à la FAO.

70 % de nourriture supplémentaire, sans tenir compte des biocarburants.

Or parmi les pays où l'agriculture est la plus menacée par le changement climatique figurent de nombreux pays en situation d'insécurité alimentaire, ainsi que des pays exportateurs. En outre certains pays craignent que les politiques de lutte contre le changement climatique, comme la protection des forêts par exemple, conduisent à réduire la production alimentaire.

 

C&E : Quelle est la place de l'agriculture dans les négociations internationales sur le climat ?

V.G : L'agriculture est sans doute le secteur le plus impacté par le changement climatique. D'ailleurs, dès 1992 à Rio, la convention internationale sur le changement climatique a fixé comme objectif de stabiliser les émissions de gaz à effet de serre « de manière à ce que la production de nourriture ne soit pas menacée ».

Pourtant, il a jusqu'ici été très peu question de l'agriculture dans les négociations climat. Et c'était surtout à propos des efforts de réduction des émissions. Depuis les accords de Cancun à la fin de l'année dernière, l'adaptation au changement

climatique est davantage mise en avant. Il en a aussi été question à Bonn. C'est l'occasion pour que le sujet de la sécurité alimentaire soit mieux traité.

 

C&E : Quel est le rôle du HLPE ?

 

V.G. : Le Groupe d'experts de haut niveau sur la sécurité alimentaire et la nutrition (HLPE) est un peu l'équivalent pour

« Le HLPE, sur la sécurité alimentaire, a été créé sur le modèle du Giec, pour le climat »

la sécurité alimentaire du Giec pour le climat. Il a été créé par les gouvernements en octobre 2009 dans le cadre de la réforme de la gouvernance mondiale de la sécurité alimentaire pour conseiller le Comité de la sécurité alimentaire mondiale (CSA).

Le CSA est la plus importante plate-forme intergouvernementale et internationale dans le domaine de la sécurité alimentaire et de la nutrition. Le HLPE a notamment pour rôle de fournir des avis et des propositions, fondés sur les connaissances disponibles et d'identifier les sujets émergents susceptibles de menacer la sécurité alimentaire.

 

C&E : Pourquoi cette consultation ?

V.G. : Le Comité de la Sécurité Alimentaire mondiale a demandé au HLPE une étude qui passera  en revue les évaluations existantes et les initiatives concernant les effets du changement climatique sur la sécurité alimentaire et la nutrition. Elle s'intéressera notamment aux régions et aux populations les plus touchées et les plus vulnérables, au point d'intersection entre le changement climatique et la productivité agricole. Elle se penchera sur les défis et les possibilités que représentent les politiques d'atténuation et d'adaptation, et sur les mesures en faveur de la sécurité alimentaire et de la nutrition.

La consultation ouverte permettra aux différents acteurs de faire part de leur avis sur le cadre proposé de l'étude. Le HLPE

« L'étude comportera, c'est important, des propositions qui pourront influer sur les décisions prises par exemple dans le cadre des négociations internationales sur le changement climatique »

travaille de façon transparente, et ici dès l'amont. Par la suite, une version intermédiaire du rapport sera, elle aussi, soumise à consultation.

 

C&E : Que peut-on attendre de cette étude ?

V.G : L'étude comportera une synthèse des connaissances et, c'est important, des propositions d'actions. Elle sera remise au CSA qui rassemble les Etats membres ainsi que des participants et observateurs représentants les organismes internationaux et les acteurs de la société civile concernés par la sécurité alimentaire.

Ces propositions pourront également influer sur les décisions prises dans d'autres enceintes, notamment dans le cadre des négociations internationales sur le changement climatique. Cette étude doit aussi servir à jeter des passerelles entre plateformes de négociations (climat, sécurité alimentaire), mais aussi entre les communautés d'experts qui les alimentent, et qui souvent évoluent trop en parallèle.

 

C&E : Quand sera-t-elle publiée ?

V.G. : Le HLPE doit remettre son rapport au Comité de la sécurité alimentaire mondiale pour octobre 2012.

* commanditée par le Comité de la Sécurité alimentaire mondiale des Nations Unies.

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