Le risque de maladies des arbres peut augmenter

18 juin 2004 - La rédaction 
Quelles conséquences peut avoir le réchauffement climatique sur les maladies des plantes ? Pour le savoir, les chercheurs de l’INRA(1) ont étudié le cas de deux maladies du chêne : l’encre et l’oïdium.

Phytophthora cinnamomi et Erisyphe alphitoides sont des champignons pathogènes, qui ont été introduits en France il y a environ une centaine d’années. Le premier est responsable dans le sud-ouest de la France de la maladie de l’encre du tronc. La maladie se manifeste par la formation d’un chancre sur la partie basse du tronc, qui déprécie fortement le bois produit.

Symptômes de la maladie de l’encre, due à l’action du champignon Phytophthora cinnamomi sur le tronc d’un chêne.

Le second est responsable de l’oïdium du chêne, maladie foliaire se traduisant par un feutrage blanc souvent spectaculaire sur les feuilles des chênes. Il ralentit la croissance des arbres par réduction de la photosynthèse au niveau des feuilles.

Des séries chronologiques d’impact de ces maladies ont été obtenues, soit par l’étude rétrospective de l’évolution des chancres pour l’encre, soit à partir des données récoltées par le département de la santé des forêts (DSF) du ministère de l’agriculture pour l’oïdium.

3 zones à risque pour le développement de l’encre du chêne

Chaque année, les arbres produisent un nouveau cerne de bois. En observant sur des coupes d’arbres infectés la localisation des lésions provoquées par P. cinnamomi, les chercheurs de l’INRA ont pu dater ces lésions pour 20 arbres étudiés dans le sud-ouest de la France et ainsi reconstituer l’évolution de la maladie sur une période de 30 ans. Les chercheurs ont montré que le froid hivernal limite le développement de l’encre du chêne. Un modèle permettant de prédire la survie du parasite en fonction des conditions climatiques a alors été mis au point. L’INRA, en collaboration avec Météo France, a ainsi établi une carte du risque (voir ci-contre). Les prédictions théoriques sont cohérentes avec les observations de la maladie effectuées par le DSF dans le sud-ouest de la France. Trois zones de risque, caractérisées par des hivers doux, émergent : le pourtour méditerranéen, le sud-ouest et l’ensemble Bretagne-Cotentin, où la maladie n’a pas encore été observée sur les chênes. Une nouvelle carte qui tient compte du réchauffement climatique et qui met en évidence une extension de la zone du risque est en cours de publication.

Plus les hivers sont doux, plus les épidémies dues à l’oïdium sont sévères

 class=Les mentions d’oïdium sur chêne par le DSF au cours des 14 dernières années ont été utilisées pour mesurer l’impact de la maladie dans 5 régions françaises. L’impact de la maladie montre de fortes fluctuations inter-annuelles avec de sévères épidémies dans le sud-ouest de la France. La confrontation avec des données météorologiques montre que les épidémies sont sévères seulement les années à hiver doux, où les chênes débourrent de façon particulièrement précoce. Le mécanisme mis en jeu pourrait être une coïncidence entre la phénologie de l’hôte et celle de l’agent pathogène, l’oïdium produisant ses spores infectieuses au moment où les chênes débourrent, les années à forte épidémie.

Les années à hiver doux et à risque de forts impacts d’oïdium devraient devenir plus fréquentes en cas de réchauffement climatique. La prise en compte du changement climatique peut permettre de mieux comprendre les changements de la pression parasitaire à laquelle sont soumis les écosystèmes forestiers et d’anticiper dans certains cas. Des mesures de prévention doivent être prises dans les régions encore indemnes pour l’instant. Cette précaution est d’autant plus nécessaire qu’il n’existe pas, à l’heure actuelle, de méthode de lutte curative contre P. cinnamomi, applicable en forêt.

1 Unité de recherches « Pathologie forestière », département Ecologie des forêts, prairies et milieux aquatiques, centre INRA de Nancy.
Unité mixte de recherches INRA – Université Bordeaux I « Biodiversité, gènes et écosystèmes », département Ecologie des forêts, prairies et milieux aquatiques, centre INRA de Bordeaux.



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