Chacun se fixe ses propres objectifs d’amélioration
Tous volontaires, ils représentent presque toutes les filières agricoles : dix producteurs de légumes de plein champ, quatre de fruits, deux céréaliers, deux éleveurs de vaches laitières, un de vaches allaitantes et un de poules pondeuses ! Sans oublier la ferme de l’Isab, école d’ingénieurs en agriculture. Avec comme point commun, leur sensibilité environnementale et leur participation à plusieurs démarches qualité. Autre caractéristique, l’esprit pionner. L’exploitation de Marie Delefortrie, à Mesnil-Saint-Nicaise dans la Somme fut la première à obtenir l’agrément EurepGap en France, l’Earl Batteux (1) la qualification Quali’terre. Huit sont qualifiés. Les autres travaillent avec des cahiers des charges spécifiques par production. “Mais cette norme reste ouverte à tous, souligne Jean-Marie Fontaine, céréalier à Laon (02). Peu importe le niveau de départ. Seul compte le cercle vertueux d’amélioration.” Chaque agriculteur s’approprie la norme et se fixe ses propres objectifs d’amélioration. Garder l’initiative de ses actions apparaît comme une motivation essentielle.
Une boucle de progrès continue
La première étape fut une adhésion commune en une politique environnementale. Ensemble ils s’engagent à être acteurs du développement durable et à promouvoir l’agriculture. Mais aussi à optimiser le fonctionnement de leur entreprise et à transmettre une terre saine aux générations futures. Après un audit environnemental dans chaque exploitation, chacun s’est fixé des pistes d’amélioration sur trois ans pour chaque aspect environnemental. Avec des tableaux de bords et indicateurs chiffrés communs. Des audits croisés entre agriculteurs contrôlent l’efficacité des mesures mises en place. Suite à ces contrôles, de nouveaux objectifs sont fixés. Et la boucle est bouclée !
Créer un Iso “light” et reproductible
Simultanément, les agriculteurs ont créé leur système documentaire. Au final sept gros classeurs. Réglementations, contrôles et améliorations, ressources humaines, système de management, manuel environnemental… “Nous avons adapté la norme Iso de façon light”, résume Marc Droy, producteur de fruits à Hervilly dans la Somme. Pour la notation des modes opératoires, seules les tâches nécessitant l’utilisation de matériels ou de produits potentiellement dangereux ont été décrites. “Un investissement long au départ qui s’avère rentable lorsque l’on a plusieurs salariés et saisonniers.”
Un investissement temps et argent important
“La plus grosse difficulté ? C’est consacrer une vingtaine de journées à la formation”, constate Sophie Delemazure, consultante environnement du cabinet Péri-G. Maintenant, restent les audits croisés et les revues de terroir, des réunions semestrielles en petits comités. Au programme : remise à jour du système documentaire, comparaison des indicateurs d’amélioration, émergence de nouvelles améliorations.
Autre limite, l’investissement financier. Les réalisations varient de la mise en place d’aire de lavage ou de Phytobac, à l’installation de poubelles à tri sélectif dans les ateliers, d’aire de stockage spécifique pour les déchets à recycler. Mais aussi de remise aux normes de l’électricité, de mise en place de gestion des ressources humaines. S’ajoutent parfois des changements orientant les pratiques vers des itinéraires culturaux moins gourmands en énergie ou limitant la consommation en eau et l’érosion. La gestion documentaire et l’analyse rigoureuse des résultats demeurent des activités nécessitant beaucoup de temps. Le coût complet d’accompagnement en démarche collective comprenant le diagnostic et le système de management environnemental s’élève à 12 800 € par exploitation pour trois ans, subventionné à 70 % par l’Ademe et le Conseil régional. À cela s’ajoute un coût de certification d’environ 300 € par an et par exploitation. Comme les outils existent, l’accompagnement proposé par Péri-G devrait passer à 9 100 €. Si la valorisation immédiate par des plus-values à la vente apparaît difficile, des retombées financières existent. Comme les économies réalisées grâce à une meilleure organisation, à une optimisation des intrants, voire une diminution des primes d’assurance. Des évaluations sont en cours.
Une chose est sûre : le groupe fait des émules. Les régions Bretagne et Rhône-Alpes pourraient également utiliser le modèle de management environnemental créé en Picardie. Plusieurs groupes picards, déjà avancés dans leur démarche Iso, s’interrogent sur une éventuelle certification. “Nous avons créé un modèle applicable partout et pour toutes les productions. N’oublions pas que la norme Iso 14001 est un modèle universel à partager”, se réjouit Sophie Delemazure.
(1) Earl : Exploitation agricole à responsabilité limitée
Focus sur les normes Iso 14000
Les normes Iso 14000 aident à évaluer et documenter la conformité des entreprises à la réglementation et aux aspects environnementaux des politiques d’entreprises. Le système de management environnemental identifie à l’aide d’indicateurs la diminution des quantités de déchets et les coûts liés aux consommations en énergie et en eau. Un audit de l’impact des activités de l’entreprise sur l’environnement et un engagement de progrès constant en sont les fondements.
Les différentes phases de l’opération
- Diagnostic environnemental
- Programme d’amélioration échelonné sur trois ans
- Constitution du système documentaire
- Plan d’actions à réaliser
- Analyse avec indicateurs par rapport aux objectifs fixés
- Boucle d’amélioration, avec fixation de nouveaux objectifs d’amélioration
Les points à améliorer
- La consommation énergétique
- La gestion des déchets
- La gestion des intrants (engrais et produits phytosanitaires)
- La consommation de l’eau
- La biodiversité et insertion paysagère
- Les rejets liquides (fioul, engrais, fonds de cuve de pulvérisateur et eau de rinçage…).