Pesticide dans l’air, l’analyse des industriels

28 juin 2007 - La rédaction 
Pour l’Union des industriels de la protection des plantes, l’étude d’AirParif donne des niveaux de concentration faible, de l’ordre du ng/m3. L'UIPP rappelle que présence n’est pas nécessairement synonyme de toxicité et regrette le manque d'information sur la méthodologie. Explications autour des notions de présence, détection et risque.

Campagnesetenvironnement : Pourquoi retrouve-t-on des traces de pesticides dans l’air ?

UIPP : La majorité des traitements phytosanitaires (1) étant réalisés par pulvérisation, une partie des quantités appliquées peut se retrouver dans l’atmosphère, ceci en proportion variable selon les cultures et les conditions météorologiques.
La présence des produits dans l’atmosphère dépend des propriétés intrinsèques des molécules utilisées (aptitude à la volatilisation, durée de vie dans l’atmosphère…), mais aussi des systèmes de pulvérisation utilisés, de la nature de la formulation, du type de culture et surtout des conditions climatiques (température, humidité, vitesse du vent…).

L’évolution considérable des techniques de mesure et un renforcement de la surveillance permet également aujourd’hui de retrouver des traces infimes de produits dans l’air.
Cette présence ne signifie pas nécessairement une dégradation de la qualité de notre environnement mais elle illustre surtout le progrès des connaissances scientifiques et des capacités analytiques.
Comme cela est montré dans les diverses études disponibles à ce jour les teneurs en pesticides dans l’air sont ponctuelles et très faibles, de l’ordre du nanogramme/m3.

D’une manière générale, il importe de toujours tenir compte, dans l’analyse de ces résultats, des circonstances exactes de l’étude qui peuvent influer sur les concentrations mesurées : il est ainsi nécessaire de réaliser les analyses tout au long de l’année, et non uniquement lors des périodes de traitement, pour s’affranchir de la saisonnalité et avoir une image objective de l’exposition potentielle aux produits dans l’atmosphère.
L’évaluation de la présence de produits de protection des plantes dans l’air est prise en compte dans la procédure d’homologation (ex : la vitesse de dégradation dans l’air est calculée). Des études sont également conduites pour mesurer l’aptitude à la volatilisation à partir des végétaux traités ou du sol

CetE : Quels sont les risques sanitaires, du fait de cette présence de pesticides dans l’air que nous respirons ?

UIPP : Ceci revient en fait à se demander quelles sont les doses limites d’inhalation de produits phytosanitaires pour l’être humain.

Les teneurs relevées de l’ordre du nanogramme/m3 sont très faibles et le calcul montre que :
l’inhalation d’air contenant des traces de l’ordre du nanogramme/m3 correspond à une quantité journalière absorbée environ 1 000 000 fois inférieure à celle qui est reconnue par tous les experts comme pouvant être ingérée quotidiennement, sans aucun effet et toute la vie durant (dose journalière admissible ou DJA). Il convient de signaler que la DJA porte sur l’ingestion des produits et non sur l’inhalation, toutefois le facteur de 1 000 000 laisse une marge de sécurité particulièrement conséquente….
Si nous ne contestons pas le fait que des traces de produits se trouvent dans l’air que nous respirons, il convient donc de relativiser le risque et de s’assurer que les concentrations retrouvées ne sont pas toxiques : présence n’est pas nécessairement synonyme de toxicité.

CetE : Quels sont les dangers réellement encourus par les utilisateurs qui sont directement exposés ?

UIPP : Pour minimiser le risque pour la santé encouru par l’inhalation des produits, trois situations sont prises en compte dans la procédure d’autorisation de mise sur le marché d’un produit :

  • le risque encouru par l’applicateur lors d’une pulvérisation,
  • le risque au moment du traitement encouru par une tierce personne présente sur les lieux,
  • le risque après traitement, au moment où une personne retourne dans le champ.

Ces études, réalisées dans les conditions les plus pénalisantes, montrent que globalement les quantités inhalées sont très inférieures à la dose journalière acceptable fixée à partir des études toxicologiques à long terme, que les épandages soient réalisés en milieu confiné ou non.

Une étude très approfondie a été mise en place en 1996 par l’UIPP auprès d’arboriculteurs de la Vallée du Rhône, de la Garonne et de la Loire. Elle a permis de confirmer que la protection des mains et de la tête était indispensable dans le cas de tracteur sans cabine. Une réduction de 80 % de l’exposition totale était constatée avec ce type de protection.
Concernant les applications aériennes, celles-ci restent limitées en France puisqu’elles ne représentent que 2 à 3 % des traitements réalisés. Etroitement surveillées, elles sont soumises à des déclarations avant traitements et ne peuvent être réalisées que par des entreprises agréées.

CetE : Quelles sont les normes sur les pesticides dans l’air ?

UIPP : Contrairement à ce qui existe pour d’autres substances chimiques (dioxyde de soufre SO2, dioxyde d’azote NO2, ozone…) il n’existe pas aujourd’hui de norme officielle pour les substances phytosanitaires dans l’air.

Si des normes devaient être fixées, il faudrait qu’elles soient fondées sur une analyse individualisée par substance des risques pour la santé, de manière analogue à la gestion des résidus dans l’alimentation.

A noter que la transposition de la norme pour l’eau potable, fixée à 0,1 microgramme /l, à l’eau de pluie, à l’air n’est pas possible. Il s’agit d’éléments d’étude différents.

CetE : Quelles sont les actions menées par l’UIPP ?

UIPP : La majorité des traitements étant réalisé par pulvérisation, une partie des quantités appliquées peut se retrouver dans l’atmosphère.

Outre les études menées dans le cadre des procédures d’AMM (autorisation de mise sur le marché), les actions de l’UIPP sont de plusieurs types :

  • Afin de limiter les effets de cette dispersion dans l’air, la profession développe des formulations moins volatiles comme les formulations micro-encapsulées.

  • L’UIPP s’est également engagée dans de nombreuses actions de formation et de sensibilisation et participe à la rédaction et à la diffusion d’un ensemble de recommandations à destination des applicateurs de produits. Regroupé sous la forme de “Bonnes pratiques agricoles”, ce code de conduite incite l’agriculteur à réaliser ses traitements de façon optimale, par exemple en traitant de préférence tôt le matin ou tard le soir, et en lui déconseillant formellement de pulvériser avant la pluie, en présence de vent ou par temps très chaud qui favorise la volatilisation des produits.

  • L’UIPP contribue également aux travaux réalisés par l’un des groupes de travail du Corpen qui aborde notamment les mesures à envisager pour réduire le transfert des produits dans l’atmosphère

  • Enfin, l’UIPP a cofinancé deux thèses réalisées par l’Université de Strasbourg, ayant pour objectif de comprendre les mécanismes qui régissent la répartition des produits dans les différentes phases atmosphériques : gazeuse (air), liquide (eau de pluie) et particulaire. Elles visent par ailleurs à quantifier ces mécanismes et leur contribution respective.


(1) Les pesticides sont aussi appelés, dans le milieu agricole produits phytosanitaires ou produits phytopharmaceutiques. Ils englobent les herbicides, les fongicides, les insecticides, et autres divers (corvicides (contre oiseaux), rodenticides (rongeurs), mollusicides (mollusques)…).


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