Accusés de tous les maux, les agrocarburants méritaient d’être resitués dans un contexte global pour le moins tendu. Les interventions des deux personnalités ont sans conteste permis de mesurer l’ampleur des crises qui se télescopent : alimentaire, climatique, environnementale et financière. Le poids des agrocarburants dans ce cadre paraît bien faible. Pratiquement un épiphénomène. Pour les deux analystes, aucun doute : la gouvernance mondiale actuelle fonctionne sur des schémas périmés, inadaptés aux bouleversements en cours. « L’agriculture n’est pas au creux d’un nouveau cycle, mais bien au cœur d’une rupture qui appelle un changement du mode de fonctionnement de l’économie mondiale. Elle en est d’ailleurs emblématique », a souligné Jean-Hervé Lorenzi. Et les débats qui semblent aujourd’hui essentiels (que ce soit au G8, au FMI, à la FAO ou à l’OMC…) seront très rapidement balayés par « un basculement vers un univers équilibré autrement ».
Ni Erik Orsenna, ni Jean-Hervé Lorenzi ne présentent de remède miracle. Mais quelques axes auxquels cette nouvelle gouvernance mondiale pourraient s’attaquer : investir pour mettre en cultures les 4 milliards d’hectares non encore exploités (dont 500 000 ha en Afrique) ; laisser toute sa place au progrès technologique ; admettre les spécificités des grandes régions de la planète, réguler les échanges (ce qui rend au passage caduc l’OMC). Et en attendant ?
Erik Orsenna, qui s’apprête à publier un ouvrage sur l’eau est revenu sur l’importance du penser local. « On a réussi à bien gérer l’eau lorsqu’on a trouvé le niveau de l’agence de bassin. Plus largement, notre agriculture est liée au bassin Méditerranéen, est c’est le bon espace pour poser la problèmatique de l’eau ». Il défend aussi l’idée de la promotion des « élites paysannes » qui doivent être formées et pouvoir se saisir de leur propre devenir en créant des outils économiques dont elles aient la maîtrise.