question n’est pas un souci. À l’écouter, cela est même devenu, au fil des années, un réel leitmotiv. « En reprenant l’exploitation de mes parents, en février 2000, je me suis très vite aperçu que le système tel qu’il était ne me convenait pas, explique-t-il. Les 26 ha de cultures d’automne (blé et orge) et les 14 ha de maïs au printemps, en plus des 35 vaches laitières, créaient des pointes de travail insurmontables avec un unique salarié à mi-temps. Et puis, j’avais l’envie d’évoluer vers plus d’autonomie, en alimentation animale notamment. Voilà pourquoi la prairie et la luzerne ont peu à peu pris la place des céréales. Aujourd’hui, ces dernières n’occupent plus que 10 ha contre 26 ha en 2000. Pour moi, les choses sont claires : l’énergie la moins chère est celle que l’on ne consomme pas. Dès lors, j’ai étudié tous les postes de l’exploitation pour détecter ceux qui devaient évoluer. En 2002, j’ai donc réalisé une formation par le biais du Civam(1) pour utiliser la méthode Planète(2). »
Celle-ci permet, à l’échelle d’une exploitation agricole, de quantifier l’énergie produite et l’énergie consommée et de mettre ainsi le doigt sur les points faibles d’un système. Pour comparer les éléments consommés (fioul, électricité, engrais, pesticides, eau…) et ceux produits (lait, viande, céréales…), tous les postes sont ramenés à une valeur exprimée en EQF, équivalent litre de fioul. « Dans mon cas, quatre postes sont apparus comme étant les plus gourmands en énergie : le fioul, l’électricité, les achats d’aliments et les engrais. Depuis 2002, je travaille donc à faire baisser ces postes. »
Aller vers encore plus d’autonomie
Essai transformé puisque le second bilan Planète, réalisé en 2007, le confirme : tous postes confondus, la consommation d’énergie a diminué de 11 % et jusqu’à 65 % pour les aliments du bétail. « Faire pâturer les prairies, c’est synonyme d’économies en travail du sol, en fioul, en engrais, en phytos et bien sûr, en achat d’aliments protéinés. Avec l’herbe, le foin de luzerne et le lupin certaines années, je m’oriente vers un système plus autonome en protéines. Cette année, je vais semer 8,5 ha d’un mélange triticale, avoine, pois, pour apporter en un seul produit des qualités nutritionnelles complémentaires. Et puis, avec la mise en place du séchage en grange, j’espère franchir un nouveau pas. En effet, ce système me donne plus de souplesse dans les dates de récolte. Récolter la luzerne plus tôt, à un stade où elle a encore toutes ses feuilles, permet de conserver une plus grande richesse en protéines. Mieux nourris, les animaux sont aussi en meilleure santé : des économies en frais de vétérinaire ! »
Même constat pour le fioul, l’électricité et les intrants, pour lesquels la réduction est essentiellement liée à la diminution des surfaces cultivées. « Pour le fioul, poursuit-il, j’utilise depuis quelques années déjà de l’huile végétale. Mes 4,5 ha de colza produisent 3,5 tonnes de graines qui, elles-mêmes, donnent 2,5 tonnes de tourteaux pour au final, 1 000 l de fioul utilisé pour les tracteurs. Il est vrai qu’en 2008, avec un colza qui avoisinait les 350 à 380 Ä, il était plus intéressant de le vendre ! »
Pour l’électricité, plusieurs actions ont permis à Antoine Hocdé de réduire sa consommation. L’installation de panneaux solaires, tout d’abord, permet désormais de chauffer l’eau utilisée quotidiennement pour laver la salle de traite : une économie de près de 300 Ä par an. Même économie avec le pré-refroidisseur du tank à lait. « Je m’étonne que cette machine, peu coûteuse, soit encore si peu utilisée, confie-t-il. Car l’économie est immédiate. Ce système réceptionne le lait à 32 °C, le refroidit par un système de 18 m de tubes en serpentin dans lesquels circulent le lait et de l’eau, et le renvoie vers le tank à 18 °C. Il faut donc moitié moins d’énergie pour lui faire atteindre
la température souhaitée de 4 °C ! Seul bémol : il est encore fortement consommateur en eau. Mais chez nous, l’eau utilisée va directement dans les abreuvoirs des animaux et non dans les égouts. »
Antoine Hocdé apprécie d’autant plus de faire visiter son exploitation aux autres agriculteurs qu’avant de se lancer, il était lui aussi allé rencontrer quelques pionniers. Pour demain, d’autres projets sont à venir : d’ici à deux ans, il souhaite convertir son exploitation au bio. Une façon de jouer encore un peu plus la carte de l’autonomie.
Les chiffres
En 2002 : achat d’une chaudière utilisant du bois déchiqueté pour chauffer la