de biodiversité et a permis de dépasser les conflits d’usage. La gestion partagée de l’espace se développe.
Des exemples, hier expérimentaux, prennent aujourd’hui de l’ampleur. Le contrat agri-environnemental de la Brenne mis place par le Parc naturel régional a permis de prospecter plus de 14 000 ha et d’établir un document de synthèse remis à chaque agriculteur et lui permettant de connaître précisément les enjeux écologiques de son exploitation et de prendre les mesures appropriées pour répondre à l’objectif de conservation de la biodiversité. Dans la Chartreuse, la création de voies forestières dans le Parc naturel régional, en partenariat avec le Centre régional de la propriété forestière, a permis d’améliorer les conditions de mobilisation des bois tout en intégrant des milieux naturels remarquables et en étudiant l’impact de ces travaux sur les paysages. « C’est une contractualisation gagnant-gagnant », selon Geoffroy de Montcuit, vice-président de Forestiers privés de France.
Dans le Morbihan, la restauration de la rivière Drayac a été possible grâce à un partenariat entre la Fédération des pêcheurs et les agriculteurs riverains.
Un autre projet est en cours en Haute-Saône pour sauver l’écrevisse à pied blanc, dont la population est en forte régression du fait de la dégradation de son habitat, la perturbation par les animaux domestiques et la présence d’animaux exotiques. De même, la Fédération française de randonnée pédestre, qui gère 70 000 km de territoires balisés a mis en place une démarche qualité avec de nombreux acteurs locaux, dont les agriculteurs. Ce réseau appelé Éco-veilles a été initié en 1994 en Mayenne. Il permet de surveiller l’état des chemins et de sensibiliser les citoyens à la préservation des sentiers pédestres. Enfin, Natura 2000, qui couvre aujourd’hui 40 % du territoire, associe, selon les lieux, agriculteurs, propriétaires fonciers, forestiers, parcs naturels, Conservatoire du littoral et associations environnementales.
PARTENARIATS IMPROBABLES
Des conventions plus inattendues ont été signées entre des agriculteurs et la Ligue de protection des oiseaux (LPO), comme en Baie de l’Aiguillon. Dans ce secteur, qui accueille 100 000 oiseaux, la LPO, la Chambre d’agriculture de Vendée et une trentaine d’agriculteurs se sont regroupés pour favoriser le développement économique du site et l’intégrer durablement dans le tissu économique local.
Des partenariats tout aussi improbables ont été initiés entre la LPO et la Fédération des chasseurs, qui permettent de dépasser l’opposition traditionnelle entre la « culture de la jumelle et la culture du fusil » selon l’expression d’Allain Bougrain-Dubourg, président de la LPO. De même, une convention-cadre avifaune a été signée entre France Nature Environnement, la LPO, EDF et RTE, le Réseau de transport de l’électricité, pour protéger les oiseaux contre les électrocutions par les lignes à haute tension qui causent des dégâts à plus de 140 espèces telles que les rapaces diurnes ou l’Aigle de Bonelli, en voie de disparition. On pourrait citer également la convention entre la Chambre d’agriculture de Seine-Maritime et l’Office de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) pour limiter l’érosion sur une zone de 3 000 ha ou le projet de développement global du Cap Corse, initié par le Conservatoire du littoral, qui a permis d’installer des éleveurs et de réintroduire un vignoble de qualité tout en réduisant les risques d’incendies, en accueillant 50 000 visiteurs par ans et en protégeant le littoral.
Dans les Vosges, une action concertée entre tous les acteurs locaux a permis de relancer la production de l’arnica. Cette plante qui pousse naturellement au sommet des Vosges est utilisée pour la pharmacie et sa cueillette, aujourd’hui raisonnée, génère un chiffre d’affaires de 2 millions d’euros par an.
INCONTOURNABLE DIALOGUE
Tous ces exemples montrent que l’activité économique est indispensable à la préservation de la biodiversité et qu’il ne faut surtout pas figer les territoires. L’efficacité économique, le progrès social et la protection de l’environnement constituent bien le trépied du développement durable. Ces initiatives mettent également en évidence le rôle prépondérant de l’agriculture dans la préservation de la biodiversité. Hier mis au banc des accusés, les agriculteurs apparaissent aujourd’hui comme incontournables dans la gestion de la ressource naturelle. Ce n’est pas le moindre des paradoxes du Grenelle de l’environnement.
Tous les acteurs mettent aujourd’hui en avant l’importance du dialogue, l’ouverture aux autres, le respect de l’interlocuteur, la nécessité d’intégrer les préoccupations de chacun. Ce dialogue est une obligation car, en France, l’espace est travaillé et partagé, mais aussi très convoité. Plus de 60 000 hectares sont artificialisées chaque année et l’équivalent d’un département comme la Seine-et-Marne disparaît sous le béton tous les dix ans. Demain, l’urbanisme, le réchauffement climatique, la gestion de l’eau ou le type d’élevage auront une influence sur l’espace. Des enjeux majeurs qui font dire à Jérôme Bignon, député de la Somme et président de la table ronde mise en place après le Grenelle, qu’« il est temps d’être ensemble pour la nature ».
Deux kilomètres de haies et… 40 espèces d’oiseaux recensées
Une parcelle de 2 hectares traversée par une haie. Pour certains, un tel