Perte de biodiversité et vulnérabilité des systèmes de production

1 juillet 2014 - La rédaction 

A l'occasion d'un colloque organisé le 25 juin par la Chaire de développement durable de Sciences-Po et l'Anses*,  les chercheurs se sont interrogés sur la possibilité de voir la réduction de la biodiversité en agriculture conduire à une vulnérabilité des systèmes de production.

« La spécialisation des exploitations et des territoires pose de nombreux problèmes écologiques, dont une perte de biodiversité liée à la réduction de la diversité des habitats et une contamination croissante des rivières et des masses d'eau par les nitrates et les pesticides », constate Marc Benoit, directeur de recherche à l'Inra*.  Toutefois, pour Muriel Tichit, directrice de recherche à l'Inra, « la biodiversité peut-être un levier de performance de l'agro-écologie. Mais il ne faut pas sous-estimer les difficultés de mise en œuvre. Piloter la diversité, c'est piloter un réseau d'interactions. »

Pour Isabelle Goldringer, directrice de recherche à l'Inra, « l'agro-écologie et le travail sur la diversité génétique nécessitent des études pluridisciplinaires, associant écologues, agronomes, généticiens… Mais les verrous au changement sont plus économiques et politiques que techniques. » Marc Benoît voit ainsi comme raison essentielle à l'immobilisme sur le sujet, le fait que les responsables agricoles français ne sont pas des leaders de l'agrobiologie. Mais « les initiatives existent et la biodiversité peut être un facteur d'intensification écologique des systèmes de production agricole », souligne Bertrand Pinel, directeur scientifique du groupe coopératif Terrena.

La diversité, source d'innovation technique, mais aussi sociale
Seule coopérative agricole reconnue par le ministère de l'Ecologie comme engagée dans la Stratégie nationale de biodiversité, Terrena a bâti son contrat d'engagement à travers 21 actions axées autour de trois enjeux de la préservation de la biodiversité en milieu agricole : réduction des pesticides, diversification des assolements et préservation des continuités agro-écologiques. « Ainsi, des agriculteurs intègrent des plantes compagnes dans les cultures de colza. Ces légumineuses méditerranéennes ainsi introduites permettent de diminuer les apports d'insecticides et d'engrais. L'augmentation de la diversité peut-être aussi obtenue par l'association de cultures, comme pour le mélange lupin-triticale. Mais la préservation de la biodiversité n'est pas toujours compatible avec l'objectif de maintien de la productivité. Ainsi, les haies entourant les champs peuvent héberger des méligèthes attaquant les cultures de colza ou favoriser, à proximité de parcours de volailles, la présence d'oiseaux sauvages potentiellement porteurs de grippe aviaire. »

Développer la diversité au sein des systèmes de production « est source d'innovation technique mais aussi sociale », insiste Muriel Tichit. « Ainsi, si on veut redéployer de l'hétérogénéité paysagère, tous les compromis ne sont pas à chercher au seul niveau des exploitations agricoles individuellement. Il convient de mettre en place une nouvelle articulation, une coordination, entre exploitations. Par la création de clusters d'exploitations agricoles par exemple. Ou par la constitution, comme aux Pays-Bas, de coopératives environnementales associant les agriculteurs et les autres acteurs du territoire pour tenter de résoudre un problème ensemble. Des innovations de ce type émergeront peut-être des GIEE*… »

* Anses : Agence nationale de sécuritaire sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail
Inra : Institut national de recherche agronomique
GIEE : Groupement d'intérêt économique et environnemental

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