Version 2 d’Ecophyto : « le contrat de la deuxième chance. »

5 janvier 2015 - La rédaction 

Dans la foulée de la remise officielle de son rapport d’évaluation et de révision du plan Ecophyto au premier ministre ce mardi 23 décembre à 10 heures, Dominique Potier répond aux questions de Référence environnement. Il évoque le maintien d’un objectif de -50 % pour l’utilisation des pesticides agricoles, le choix de l’échéance 2025, le calendrier à venir et revient sur la première version du plan…Une idée forte domine le rapport : la nécessité de déployer les pratiques mises en oeuvre sur les fermes Dephy, qui, à conditions climatiques équivalentes, auraient réussi à maîtriser leur consommation de pesticides. Sous-titré « les champs du possible », cette seconde version proposée d’Ecophyto, se veut « le contrat de la deuxième chance. »

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Vous revenez sur un  objectif « -50 % » pour l’utilisation des pesticides, alors que certains souhaitent que soit plutôt mis en avant la diminution de leur impact…
Dominique Potier : Faut-il limiter l’utilisation des pesticides, ou faut-il réduire leur impact sur l’environnement ? Le débat est vieux comme Ecophyto et je le tranche en disant qu’il faut limiter leur impact sur l’environnement en limitant leur utilisation ! Les arguments qui avaient motivé cet objectif  de -50 % lors du Grenelle sont aujourd’hui renforcés, qu’il s’agisse de la préservation de la biodiversité et de la qualité de l’eau, mais aussi d’autres milieux moins cités mais importants comme l’air, le sol. Il me parait donc important de le réaffirmer, avec toutefois la prudence qu’imposent les résultats actuels, concernant les échéances.

Justement, pourquoi cette échéance en particulier, 2025 ?
DP : Dans un premier temps, sans révolutionner la ferme France, les experts et les acteurs de terrain affirment que l’on peut atteindre une réduction de 20 à 25 % en cinq ans, si tous les leviers actuellement identifiés sont actionnés simultanément. En mettant en avant l’innovation dans les agro-équipements, la génétique, les rotations et diversités des cultures, ou encore les outils d’aide à la décision et le biocontrôle… Au-delà de ces -25 %, qui dépendent donc essentiellement d’une volonté forte et commune, on ne peut pas prétendre atteindre -50 % en moins de dix ans, étant donné les tendances récentes. Atteindre ce cap n’est pas possible dans le monde d’aujourd’hui : cela impose un vrai changement de cadre, notamment au niveau de la Pac* ou de la régulation des marchés internationaux. L’horizon 2025 exprime la nécessité d’un pas de temps suffisant pour changer la donne structurellement.

Quelles est la suite du calendrier, concernant une officialisation du plan Ecophyto 2 ?
DP : Le rapport est rendu, il faudra un peu de temps pour que ses enseignements soient suivis d’orientations, mais je souhaite naturellement que cela soit le plus rapide possible. Je rencontrerai le comité consultatif et le comité d’experts Ecophyto mi-janvier. Stéphane Le Foll animera une grande journée dédiée à Ecophyto et à son projet agro-écologique le 30 janvier. Le début de 2015 sera donc un temps fort au niveau des débats. Les premiers choix devraient suivre.

Votre rapport a été remis au premier ministre le jour même où est révélée l’augmentation de 9,2 %, entre 2012 et 2013, des recours aux pesticides en agriculture. Que vous inspire ce chiffre ?
DP : La publication de ces chiffres et la remise de mon rapport aujourd’hui est une heureuse coïncidence, qui justifie la nécessité d’agir. Je ne veux cependant pas porter un regard dur ou ironique sur ce qui a été fait dans le cadre d’Ecophyto jusqu’à présent, ou laisser entendre que le travail a mal été fait. Dans le cadre de ma mission, j’ai vu l’utilité d’Ecophyto, j’ai vu une réelle dynamique sur le terrain.

Quelles sont justement, selon vous, les satisfactions de la « version 1 » d’Ecophyto ?
DP : En premier lieu, les 200 000 formations Certiphyto dispensées aux agriculteurs, sensibilisés à leur protection lors de l’utilisation de pesticides et à la préservation de leur santé. Je cite également le succès des réseaux de fermes Dephy. Alors que les chiffres que vous citez font état d’une augmentation des recours aux produits phytopharmaceutiques, les 2000 fermes ont prouvé qu’on pouvait, dans les mêmes conditions, porter une dynamique inverse. L’un des enjeux de la version 2 sera de capitaliser sur ces réussite, de les diffuser. Une grande campagne de communication serait nécessaire, autour de ce que j’appelle la « culture positive ». On doit montrer que ces exploitations ont de bons résultats écologiques, et qu’elles s’en portent bien économiquement et socialement.

Découvrez le rapport intégral ou sa synthèse.

* Les modalités actuelles de la Pac sont fixées jusqu’à 2020 (ndlr).

Propos recueillis par Eloi Pailloux pour le site Référence Environnement.

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