Milan 2015 : Quel lien entre le prix et la qualité des produits ?

8 juillet 2015 - La rédaction 
Tout au long de l'Exposition universelle de Milan, Campagnesetenvironnement.fr vous propose un retour vidéo sur les débats du pavillon France. Focus sur la conférence de Louis-Georges Soler, qui nous explique pourquoi les différences de revenus impactent la qualité de l'alimentation et nous propose des pistes d'actions pour réduire ces inégalités.

Le prix que nous payons pour notre alimentation impacte-t-il la qualité de celle-ci ? Y a-t-il forcément plus d'obésité et de problèmes de santé liés à l'alimentation chez les groupes sociaux aux revenus les plus bas ? Pour cette quatorzième conférence des Mercredis du Pavillon France, Louis-Georges Soler, économiste à l'Institut national de recherche agronomique, nous éclaire sur ces questions et propose quelques solutions pour palier aux inégalités alimentaires liées aux revenus. 
 
Des régimes alimentaires différents selon le PIB d'un pays…
Dans quasiment tous les pays du monde, les changements dans les régimes alimentaires sont corrélés à l'augmentation du niveau de vie. Dans un pays au PIB élevé, on note généralement une baisse du taux de glucides dans l'alimentation accompagnée d'une hausse du taux de lipides et de protéines. La structure des apports alimentaires change également : dans les pays développés, on observe une augmentation des lipides et protéines d'origine animale et un plus fort taux de sucres simples dans l'alimentation.
 
 …et suivant les niveaux de revenus des individus…
Les consommations diffèrent également suivant les catégories sociales et les niveaux de revenus. On observe globalement une moindre consommation de fruits et légumes chez les personnes aux revenus les plus bas, ainsi qu'une alimentation comprenant plus de plats préparés, de produits sucrés et de féculents. Par ailleurs, les études convergent sur l'effet du niveau d'éducation, qui permet souvent d'expliquer les comportements alimentaires.
 
Ces différences pourraient s'expliquer par la variabilité du revenu accordé à l'alimentation suivant les catégories sociales. La restauration au foyer peut varier de 4 € par personne et par jour pour les revenus les plus faibles et atteindre 12€ par jour pour les personnes plus aisées. 
 
…mais le critère économique n'explique pas tout
Avec le système de prix actuel, un montant de 4 € par personne et par jour permet-il une alimentation de qualité, favorable à la prévention de maladies chroniques et préservant l'environnement ? 
 
On observe, depuis les années 70, un écart de prix qui se creuse de plus en plus entre les produits alimentaires. Aujourd'hui, les fruits et légumes coûtent plus chers que des produits gras et transformés. Si certaines études montrent que des produits au prix faible ont une moindre qualité nutritionnelle, ça n'est pas toujours vrai. 
 
« Le critère économique ne suffit pas à expliquer la variété des comportements alimentaires, avec 4 à 5 € par jour on peut avoir des repas aux qualités nutritionnelles très variables, faibles ou élevées », souligne Louis-Georges Saler. Le chercheur indique qu'il y a un manque de transparence pour le consommateur, la qualité nutritionnelle des produits n'est pas forcément liée aux prix ou aux marques des produits.. 
 

Composition des produits alimentaires et santé publique
A consommation constante, une réduction de 20 % des sucres ajoutés dans les aliments diminuerait de 4 à 5% l'obésité et le diabète de type II. L'industrie a donc un rôle important à jouer, l'amélioration de la composition nutritionnelle des aliments apparaît comme une variable d'ajustement majeure pour la santé publique.
 
On note aujourd'hui une réelle préoccupation, tant des industriels que des consommateurs, pour une alimentation de qualité. Si une réelle dynamique est engagée, les impacts sont encore trop faibles pour observer une réelle amélioration des problèmes de santé publique liés à l'alimentation. 
 
Une tension entre les préoccupations santé et le plaisir gustatif
Pour Louis-Georges Soler, cela s'explique par la tension qui existe chez les consommateurs entre la dimension santé et la dimension hédonique, la plaisir lié à l'alimentation. Par exemple, pour beaucoup de consommateurs, l'évocation d'une teneur moindre en sel provoque l'idée d'un aliment moins bon au goût.
 
Cela impacte fortement les stratégies industrielles. Par conséquent, si un industriel diminue la teneur en sel de ses produits, il ne vaut mieux pas qu'il communique sur cette modification auprès des consommateurs. Ainsi, pour de réels bénéfices en termes de santé publique, il faudrait que tous les industriels décident au même moment de réduire la teneur en sel de leurs produits. Les politiques publiques ont un rôle fort à jouer pour assurer cette coordination et faire en sorte que les changements s'opèrent. 
 
Pour des campagnes de sensibilisation efficaces
Les campagnes de sensibilisation sont des instruments souvent utilisés par les politiques pour améliorer la santé publique. La campagne « mangez 5 fruits et légumes par jour », par exemple, augmente la disposition des consommateurs à payer pour des fruits et légumes. Des études montrent toutefois que ces campagnes impactent les consommateurs qui avaient déjà une forte disposition à payer, c'est-à-dire les personnes de catégories moyennes et aisées. Ce genre de campagne risque donc d'accroître les inégalités. 
 
Pour Louis-Georges Soler, deux indicateurs sont à prendre en compte dans la mise en œuvre de campagnes de sensibilisation : l'efficacité à augmenter la disposition des consommateurs à payer, et les inégalités engendrées. Ces campagnes doivent donc être associées à des outils permettant de réduire les inégalités, comme accorder un financement aux plus démunis pour l'achat de fruits et légumes par exemple.  

Générique réalisé par Alimentation Générale

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