C’est un document d’une exhaustivité « sans précédent », fruit d’un travail de trois ans. Le 6 mai 2019, la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES) a présenté son rapport sur l’état de la biodiversité. Le constat est aussi alarmant qu’implacable. Un million d’espèces animales et végétales, sur huit millions présentes sur Terre, sont actuellement menacées d’extinction, dont de nombreuses au cour des prochaines décennies. Le taux d’extinction actuel est des dizaines, voire des centaines de fois plus élevé que celui des dix derniers millions d’années.
Le secteur agricole à la fois responsable et victime
L’agriculture pourrait faire les frais de cette chute libre de la biodiversité. 75 % des types de cultures vivrières mondiales dépendent des pollinisateurs. La rapport avance qu’une partie de la production agricole annuelle mondiale, d’une valeur marchande estimée entre 235 et 577 milliards de dollars, est confrontée au risque de disparition de ces insectes. « Mille races de mammifères domestiqués pour l’agriculture sont menacées », précisent encore les auteurs de l’étude.
Si l’agriculture souffre de l’érosion de la biodiversité, les pratiques agricoles intensives sont également identifiées parmi les responsables. Le changement d’utilisation des terres est ainsi le premier facteur de dégradation cité par l’IPBES, devant notamment le changement climatique ou la pollution. « Nous ne voulons pas condamner les agriculteurs. Au contraire, nous souhaitons faire face ensemble à ce défi, précise cependant Anne Larigauderie. Cela dit, la manière dont nous produisons notre alimentation a des conséquences. En France, l’enjeu principal est la réduction de l’utilisation des pesticides. » Le rapport plaide ainsi pour le déploiement et la promotion des pratiques agroécologiques.
« Pas trop tard pour agir »
« Le rapport nous dit aussi qu’il n’est pas trop tard pour agir, mais seulement si nous commençons à le faire maintenant à tous les niveaux, du local au mondial », indique l’ancien président de l’IPBES, Robert Watson (1). Le rapport met en évidence l’insuffisance des trajectoires politiques actuelles. « Des progrès sont réalisés mais cela n’est pas suffisant pour faire face à l’ampleur du phénomène », regrette Sandra Diaz, co-rapporteure du rapport. Pour parvenir à renverser la situation, les auteurs du rapport en appellent à des « changements en profondeur », sur des sujets tels que la production des aliments.
« Nous ne devons pas travailler sur le climat, la biodiversité, la qualité de l’eau, le bien-être de tous… de manière séparée. Tout est lié. Ce n’était pas dit de manière aussi claire dans les précédents rapports », souligne Sandra Diaz. « La biodiversité n’est pas uniquement liée à l’environnement. Le vrai défi aujourd’hui est d’intégrer ces préoccupations à l’ensemble des secteurs d’activité, notamment ceux économiques et de la finance », plaide Robert Watson.
L.H. et E.P.
(1) Ana Maria Hernandez Salgar a été élue présidente de l’IPBES le 4 mai 2019, succédant ainsi à Sir Robert Watson. Elle occupe le poste de cheffe du bureau des affaires internationales de l’Institut Alexander von Humboldt pour la recherche sur les ressources biologiques de Bogota.
Dans le monde, le changement d’utilisation des terres, transformation d’espaces naturels en espaces agricoles, est d’abord du à l’augmentation de la population mondiale.
En France, c’est l’urbanisation qui fait chuter les surfaces cultivées.
L’essentiel serait de limiter l’expansion de l’espèce humaine et de réduire l’urbanisation des milieux; ces sujets rarement évoqués et paraissent tabou.
Si moins de pesticides réduit le rendement (le rendement du blé bio atteint environ 50% du blé conventionnel), alors il faut plus de surfaces…
Contradictoire.
Dans le monde, le changement d’utilisation des terres, transformation d’espaces naturels en espaces agricoles, est d’abord du à l’augmentation de la population mondiale.
En France, c’est l’urbanisation qui fait chuter les surfaces cultivées.
L’essentiel serait de limiter l’expansion de l’espèce humaine et de réduire l’urbanisation des milieux; ces sujets rarement évoqués et paraissent tabou.
Si moins de pesticides réduit le rendement (le rendement du blé bio atteint environ 50% du blé conventionnel), alors il faut plus de surfaces…
Contradictoire.