Comment déterminer la longueur des zones sans traitement de pesticide, à proximité des habitations ? Cette question agite les sphères politiques, agricoles et médiatiques depuis plusieurs semaines. Le gouvernement, à travers un arrêté actuellement en consultation, souhaite privilégier le cas par cas, en laissant les préfets de départements mener des concertations au niveau local, via des « chartes de riverains ». En cas de désaccord, des mesures « nationales » seraient appliquées par défaut.
Aider les riverains à comprendre le métier d’agriculteur
Certains n’ont pas attendu la validation de cet arrêté. La Seine-et-Marne fait partie de la quinzaine de départements où une charte est déjà rédigée. « L’initiative remonte à un peu plus d’un an, raconte Cyrille Milard, président de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles (FDSEA). Le vrai déclencheur a été une série d’agressions, plus ou moins graves, à l’encontre d’agriculteurs. Entre exploitants, nous avons essayé de comprendre l’origine de l’incompréhension, et nous avons conclu à la nécessité d’échanger davantage avec nos voisins, de les aider à mieux comprendre notre métier. »
Des mesures qui vont plus loin que la réglementation
Ce sont donc les agriculteurs qui ont pris la main. « Nous avons réfléchi, entre agriculteurs, à ce que nous pouvions faire au-delà de la réglementation, pour apaiser les riverains, explique encore Cyrille Milard. La technologie et l’innovation sont nos premiers alliés. » La charte comprend l’utilisation de buses d’application « antidérive », quels que soient les produits utilisés. Ainsi que l’emploi d’adjuvants pour alourdir les produits pulvérisés, soit 95 % des volumes appliqués. Dans les deux cas, l’idée est d’éviter « l’envol » de gouttelettes, qui pourrait retomber chez les riverains, et pas sur la plante.
« De plus, au-delà des contraintes météorologiques réglementaires, comme par exemple ne pas traiter en cas de vent, nous acceptons de complexifier un peu plus le calendrier d’application en traitant à des horaires où les riverains ne sont pas dans les jardins ou en promenade, tôt le matin ou tard le soir », ajoute Cyrille Milard. Autre mesure de la charte : davantage d’échanges avec la population, via les conseils municipaux, et l’organisation de réunions de discussions ouvertes.
Une charte à partager
Une fois créée, la charte ne vaut que si elle est partagée. En Seine-et-Marne, l’Union des maires l’a signé, ainsi que le conseil départemental. La préfète, également signataire, a accepté de jouer un rôle de conciliation ou de médiation en cas de litige entre agriculteur et riverain. L’Union des maires ruraux devrait suivre et des contacts sont établis avec l’antenne locale de l’association Générations futures.
Le travail n’est toutefois pas fini. Une fois l’arrêté du gouvernement validé et publié, il faudra ajuster la charte à ses exigences, et ce avant le 1er janvier 2020. « En l’état, notre charte ne répond pas à chacun des nombreux critères de l’arrêté, reconnaît Cyrille Milard. Mais nous avons anticipé plusieurs d’entre eux, et nous sommes prêts à l’amender, bien sûr. »