“Chauffer les communes avec les effluents d’élevage”

22 juin 2006 - La rédaction 
La station de méthanisation de Beckerich (Luxembourg) fonctionne depuis près de deux ans. Outre le fait que les dix-neuf coopérateurs n’ont plus à gérer leurs effluents liquides, cette installation emploie deux personnes à plein temps.

Mise en route en juin 2004, la station collective de Beckerich (Luxembourg) regroupe dix-neuf exploitations. Elle emploie deux salariés, Constant Kieffer, pour la gestion administrative, et un chauffeur pour la maintenance et le transport des effluents. Selon l’autonomie en stockage des exploitations, le camion-citerne (18?000 litres) collecte régulièrement le lisier dans chaque ferme et alimente les digesteurs de la station collective. Les agriculteurs apportent également leur fumier, ainsi que leurs restes d’ensilage et perçoivent une indemnité pour le transport. Restent 120 hectares de cultures énergétiques (maïs, triticale, escourgeon, etc.) achetées à leurs producteurs qui contribuent pour plus de 50 % à l’énergie produite sur la station. Après transformation, le digestat est pompé par le camion et réparti dans une dizaine de cuves de stockage disséminés un peu partout dans la campagne. Il sera épandu par un entrepreneur de travaux agricoles, payé par la station.

La mélangeuse à poste fixe alimente régulièrement et automatiquement les deux digesteurs en ensilages, fumiers et cultures énergétiques.

La station de Beckerich dispose de deux lignes de méthanisation identiques, comprenant chacune un digesteur de 1?200 m3, qui contribue à 70 % de la production de méthane (durée de séjour de 20 jours), suivi d’un postdigesteur, de capacité et de fonctionnement identiques au digesteur, contribuant à 20 % de la production (20 jours également) et la fosse de stockage (5 % de la production), non chauffée. La station travaille en fermentation mésophile à une température évoluant entre 38 et 40 °C.

Les agriculteurs ne touchent plus au lisier

Constant Kieffer s’occupe de la gestion administrative de la station de méthanisation de Beckerich : “Outre le fait pour l’agriculteur de déléguer la gestion et l’épandage des effluents d’élevage, le système collectif présente l’avantage de créer des emplois.”

L’électricité est vendue à la Cégédel (compagnie électrique luxembourgeoise) 8,1 centimes d’euros par kilowattheure, auxquels il faut ajouter 2,5 centimes/kWh d’encouragement de la part de l’état. Elle est produite par deux cogénérateurs, l’un de 500 kWh à allumage par bougies, l’autre dit dual-fuel, qui injecte 2 à 4 % de fioul pour allumer la chambre de combustion. La puissance thermique (environ 700 kWh) alimente le réseau de chauffage d’une commune et bientôt d’une deuxième.
La station fonctionne en grande partie de manière automatique. Une mélangeuse à vis verticales à poste fixe alimente les deux digesteurs par cycle de 4 minutes toutes les 2 heures. à l’aide d’un chariot télescopique, l’employé chargé de la maintenance remplit matin et soir la mélangeuse, avec un savant dosage de maïs, herbe et fumier. Tout est pesé, afin d’avoir une traçabilité des plus complètes. «C’est une station de traitements des déchets», rappelle Constant Kieffer.
Pour les 19 agriculteurs coopérateurs de la station, l’intérêt de la station collective, est de ne plus avoir à s’occuper des effluents. «On les prend chez lui et on lui paie l’épandage dans ses parcelles, explique Constant Kieffer. Les étables les plus récentes n’ont plus de cuves de stockage énormes, ce qui représente une économie également dans les infrastructures. L’idéal à moyen terme serait d’avoir un retour sur investissement, avec une rémunération pour chaque agriculteur. Mais le budget initial prévu pour l’installation a été largement dépassé (4,5 millions d’euros heureusement bien subventionnés).»

Installation collective

Quid de la France ?

Plusieurs projets d’installations collectives sont en cours en France.
Regroupant 39 agriculteurs dans un rayon de 15 km, la communauté des communes de Jarny (Meurthe-et-Moselle) entend chauffer sa piscine avec une station collective de méthanisation du fumier. Cette installation permettrait de répondre aux questions de mise aux normes impossibles dans les zones d’aléas miniers. C’est une stratégie gagnant-gagnant, car les agriculteurs entendent réaliser des économies d’échelle, tandis que la municipalité réduira ses coûts de chauffage de l’installation nautique.
En Bretagne, le projet Geotextia (Le Méné dans les Côtes-d’Armor) prévoit une installation de méthanisation avec production unique de chaleur. Celle-ci sera exploitée pour sécher le digestat après centrifugation, en vue d’exporter l’engrais organique et de répondre aux problèmes d’excédent structurels. Ce projet pourrait se concrétiser avant la fin de l’année.

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