« Il est plus facile de tromper les gens que de les convaincre qu’ils ont été trompés. » C’est sur cette citation de l’écrivain américain Mark Twain que le documentaire Food Evolution s’ouvre. Sorti aux États-Unis en 2017, il arrive sur les écrans français le 20 février. Parfois critiqué pour ce qui est considéré comme un parti-pris « pro-OGM », le film, selon son réalisateur Scott Hamilton Kennedy, défend une approche « pro-science ».
Analyser les ressorts de la contestation
Le documentaire interroge en effet sur les ressorts de la contestation sociétale contre les OGM, et souligne le fait qu’aujourd’hui, aucune étude scientifique n’a prouvé la dangerosité de ces organismes. « Les OGM sont un outil qui peut aider à rendre notre système alimentaire plus sûr et durable face aux défis majeurs tels que le changement climatique, les maladies – tant du point de vue de la santé des plantes que de l’homme – et de la malnutrition, entre autres », plaide le réalisateur sur le site du film. Une manière de souligner, comme le rappelle le documentaire, que les pro-OGM, comme leurs contradicteurs, affirment se battre pour un meilleur système alimentaire.
« Il est plus facile d’effrayer les gens que de les informer », explique le militant écologiste britannique Mark Lynas dans le film. Ce dernier a fauché pendant des années des champs d’expérimentation OGM, avant de se raviser et de changer de posture, il y a cinq ans. Présent lors d’une projection en avant-première du film, le 24 janvier à Paris (1), il est revenu sur son cheminement personnel : « Il ne me semblait pas cohérent d’être pro-science pour la question du changement climatique, et contre la science pour celle des OGM », explique-t-il.
(1) Organisateurs : le SYRPA (association regroupant les communicants du monde agricole), l’Association des journalistes de l’agriculture et de l’alimentation (AFJA), l’Académie d’Agriculture de France et le think tank Agridées
SCIENCE ou CONSCIENCE
Scott Hamilton Kennedy, lors de la projection du film, nous a présenté son travail comme étant, non pas un plaidoyer pour ou contre les OGM, mais une invitation à se poser les bonnes questions (scientifiques). Louable intention que de vouloir éveiller les consciences. Mais, dès le début du reportage, on nous livre une vérité indiscutable : pour nourrir 9 milliards d’individus, il faudra compter sur les progrès de l’agriculture. Quel dommage de commencer par une affirmation toute relative. Méfions-nous de l’usage des mots et leur sens. L’industrie de la pêche en mer a fait d’énormes progrès. Mais quand on réalise que cela permet de vider les océans de plus en plus rapidement, on peut se demander où est le progrès ?
Ensuite, on assiste à la difficulté rencontrée par les cultivateurs de papayes à Hawaï. Les plantations sont malades. Seuls les plans transgéniques sont à l’abri de l’hécatombe. On apprend également que les hawaïens fournissent le marché mondial de la papaye. Et de fait, sans OGM, ils perdent des parts de marché. On aurait pu proposer à ces fermiers de se lancer dans une agriculture résiliente et diversifiée pour atteindre l’autosuffisance alimentaire et être ainsi à l’abri des aléas d’un marché qui se joue au-delà de leur frontière. A l’heure où il nous faut impérativement réduire nos émissions de CO2, la solution ne serait-elle pas de produire et consommer local plutôt que nourrir le commerce mondial ?
On nous redonne ensuite un scénario analogue en Ouganda pour une femme dont les champs de bananiers sont atteints d’une maladie incurable. La destruction par le feu est la seule issue, c’est un désastre pour cette maman et sa famille. Si cette femme avait planté des bananiers OGM, elle n’en serait pas là. Par opposition à cette solution, on nous présente un personnage ridicule qui ressasse qu’en consommant des produits issus de plans génétiquement modifiés, on peut attraper le sida. Ceci en vendant ses propres livres et autres céderons à la teneur très certainement douteuse. Ne s’éloigne t-on pas là des arguments scientifiques prônés dans ce même reportage ?
La science contribue au débat public. Monsieur Séralini a validé une étude démontrant la toxicité des OGM sur des rats. Étude validée, puisque reconnue par des pairs et donc publiée. Il faudra quelques années pour qu’une autre étude vienne annuler la précédente, et affirme qu’il n’y a aucun danger pour les rats nourris aux OGM. Dont acte, la publication est annulée. Mais l’étude de Mr Séralini a bien été validée à un moment donné ? Quand doit-on croire la science ? Quand elle favorise le commerce des produits phytosanitaires et les brevets sur le vivant ou lorsqu’elle bouscule les marchés industriels ?
Les OGM seraient la solution face au défit alimentaire mondial. Comment en sommes-nous arrivés là ? Pourquoi un virus s’attaque-il si facilement à tout un champ où pousse une seule espèce végétale ? L’agriculture conventionnelle n’a cessé d’exploiter les sols en monoculture. Et la science à dû mettre régulièrement au point des soins palliatifs ou curatifs pour permettre à nos plantations de croitre toujours plus haut, toujours plus dense. Avons-nous oublié à ce point que nous vivons sur une planète d’une richesse exceptionnelle si elle est respectée dans sa biodiversité ? Nous la saccageons sans relâche, comme si la science allait tout résoudre. Les sols se meurent car nous les tuons, les forêts disparaissent car nous les exploitons, les océans sont des poubelles car nous les polluons. La science nous aidera t-elle à sortir indemnes de cette spirale infernale ?
Les OGM vont peut-être permettre de cultiver plus, mais n’y a t-il pas une contradiction alors que nous jetons déjà 30% (voire plus) de notre alimentation non consommée, dans le monde ? Avant de faire appel à la science, ne devrions-nous pas nous poser quelques questions ? Est-ce de cette agriculture dont nous avons besoin ? La culture vivrière, en permaculture ou agro-foresterie est une méthode performante validée par l’INRA. Les ventes directes, locales, au fil des saisons sont des marchés respectueux des producteurs et des consommateurs. Elles maintiennent les sols en vie, à échelle humaine et réduisent la dépendance aux énergies fossiles. Voulons-nous alimenter le commerce mondial de la papaye ou réapprendre à nous nourrir avec un minimum de questionnement et un maximum de sérénité ?
Il y a un risque à diffuser un reportage qui apporte des réponses sans questions. En l’état, cela nous éloigne encore un peu plus d’une réflexion individuelle et collective incontournable sur le bienfondé de telle ou telle pratique. Derrière ce film se cache un véritable danger : est-ce que notre conscience nous aidera à prendre soin du vivant sur notre unique planète ? Ou bien, laissera t-on la science et l’industrie nous précéder dans notre vision du monde ?
SCIENCE ou CONSCIENCE
Scott Hamilton Kennedy, lors de la projection du film, nous a présenté son travail comme étant, non pas un plaidoyer pour ou contre les OGM, mais une invitation à se poser les bonnes questions (scientifiques). Louable intention que de vouloir éveiller les consciences. Mais, dès le début du reportage, on nous livre une vérité indiscutable : pour nourrir 9 milliards d’individus, il faudra compter sur les progrès de l’agriculture. Quel dommage de commencer par une affirmation toute relative. Méfions-nous de l’usage des mots et leur sens. L’industrie de la pêche en mer a fait d’énormes progrès. Mais quand on réalise que cela permet de vider les océans de plus en plus rapidement, on peut se demander où est le progrès ?
Ensuite, on assiste à la difficulté rencontrée par les cultivateurs de papayes à Hawaï. Les plantations sont malades. Seuls les plans transgéniques sont à l’abri de l’hécatombe. On apprend également que les hawaïens fournissent le marché mondial de la papaye. Et de fait, sans OGM, ils perdent des parts de marché. On aurait pu proposer à ces fermiers de se lancer dans une agriculture résiliente et diversifiée pour atteindre l’autosuffisance alimentaire et être ainsi à l’abri des aléas d’un marché qui se joue au-delà de leur frontière. A l’heure où il nous faut impérativement réduire nos émissions de CO2, la solution ne serait-elle pas de produire et consommer local plutôt que nourrir le commerce mondial ?
On nous redonne ensuite un scénario analogue en Ouganda pour une femme dont les champs de bananiers sont atteints d’une maladie incurable. La destruction par le feu est la seule issue, c’est un désastre pour cette maman et sa famille. Si cette femme avait planté des bananiers OGM, elle n’en serait pas là. Par opposition à cette solution, on nous présente un personnage ridicule qui ressasse qu’en consommant des produits issus de plans génétiquement modifiés, on peut attraper le sida. Ceci en vendant ses propres livres et autres céderons à la teneur très certainement douteuse. Ne s’éloigne t-on pas là des arguments scientifiques prônés dans ce même reportage ?
La science contribue au débat public. Monsieur Séralini a validé une étude démontrant la toxicité des OGM sur des rats. Étude validée, puisque reconnue par des pairs et donc publiée. Il faudra quelques années pour qu’une autre étude vienne annuler la précédente, et affirme qu’il n’y a aucun danger pour les rats nourris aux OGM. Dont acte, la publication est annulée. Mais l’étude de Mr Séralini a bien été validée à un moment donné ? Quand doit-on croire la science ? Quand elle favorise le commerce des produits phytosanitaires et les brevets sur le vivant ou lorsqu’elle bouscule les marchés industriels ?
Les OGM seraient la solution face au défit alimentaire mondial. Comment en sommes-nous arrivés là ? Pourquoi un virus s’attaque-il si facilement à tout un champ où pousse une seule espèce végétale ? L’agriculture conventionnelle n’a cessé d’exploiter les sols en monoculture. Et la science à dû mettre régulièrement au point des soins palliatifs ou curatifs pour permettre à nos plantations de croitre toujours plus haut, toujours plus dense. Avons-nous oublié à ce point que nous vivons sur une planète d’une richesse exceptionnelle si elle est respectée dans sa biodiversité ? Nous la saccageons sans relâche, comme si la science allait tout résoudre. Les sols se meurent car nous les tuons, les forêts disparaissent car nous les exploitons, les océans sont des poubelles car nous les polluons. La science nous aidera t-elle à sortir indemnes de cette spirale infernale ?
Les OGM vont peut-être permettre de cultiver plus, mais n’y a t-il pas une contradiction alors que nous jetons déjà 30% (voire plus) de notre alimentation non consommée, dans le monde ? Avant de faire appel à la science, ne devrions-nous pas nous poser quelques questions ? Est-ce de cette agriculture dont nous avons besoin ? La culture vivrière, en permaculture ou agro-foresterie est une méthode performante validée par l’INRA. Les ventes directes, locales, au fil des saisons sont des marchés respectueux des producteurs et des consommateurs. Elles maintiennent les sols en vie, à échelle humaine et réduisent la dépendance aux énergies fossiles. Voulons-nous alimenter le commerce mondial de la papaye ou réapprendre à nous nourrir avec un minimum de questionnement et un maximum de sérénité ?
Il y a un risque à diffuser un reportage qui apporte des réponses sans questions. En l’état, cela nous éloigne encore un peu plus d’une réflexion individuelle et collective incontournable sur le bienfondé de telle ou telle pratique. Derrière ce film se cache un véritable danger : est-ce que notre conscience nous aidera à prendre soin du vivant sur notre unique planète ? Ou bien, laissera t-on la science et l’industrie nous précéder dans notre vision du monde ?