Jacques Le Hericy, directeur développement durable à l’ONF : "le mélange des espèces est désormais privilégié !"

30 juin 2009 - La rédaction 
Réduction des émissions de gaz à effet de serre,
développement des énergies renouvelables : la forêt est au centre de l’échiquier de la lutte contre le changement climatique. Frappée de plein fouet par le réchauffement, elle doit aujourd’hui s’adapter pour faire face à des phénomènes météorologiques toujours plus intenses. Explications avec Jacques Le Hericy, directeur de l’environnement et du développement durable à l’Office national des forêts (ONF).

CAMPAGNES ET ENVIRONNEMENT : Comment se traduit la prise en compte du changement climatique dans la gestion des forêts françaises ?

Jacques Le Hericy : Le changement climatique est en toile de fond de toutes les politiques visant à définir la forêt de demain. Dans chaque document d’aménagement forestier, la question du choix des essences forestières les mieux adaptées se pose dorénavant. À

L’idéal est de permettre au vent de pénétrer « en peigne » dans le massif, pour en diminuer les effets négatifs et le ralentir progressivement.

l’ONF, nous suivons deux lignes directrices. La première est liée aux tempêtes et événements climatiques : que faire pour prévenir et ensuite « réparer » les catastrophes naturelles ? La deuxième concerne la biodiversité : comment gérer au mieux le patrimoine naturel et donner le maximum de « résilience » aux écosystèmes forestiers au regard des évolutions climatiques ? En d’autres termes, comment permettre et garantir une évolution adaptée des écosystèmes ? Et puis nous avons un objectif stratégique, qui est de léguer aux générations futures des forêts publiques en état optimal, en termes de richesses patrimoniales et de diversité génétique.

Quels sont les moyens d’action pour adapter les massifs forestiers à des vents beaucoup plus violents ?
J.L.H. : À 150 km/h, pratiquement aucun arbre ne résiste. L’un de nos moyens d’action se situe au niveau des techniques de boisement. L’objectif : faire entrer progressivement le vent dans le massif forestier pour le briser petit à petit. La gestion des lisières est importante par exemple. Il faut absolument éviter un effet de « barrière » qui provoque une remontée rapide du vent, suivie d’une brutale retombée au coeur du massif, avec le plus souvent des effets de tourbillons. Et des dégâts importants. L’idéal est de permettre au vent de pénétrer « en peigne » dans le massif, pour en diminuer les effets négatifs et le ralentir progressivement. Dans certains lieux, le choix des essences et leur mélange peut aider en fonction du sol, de la taille du fût, du volume et de la répartition des ramifications et de la biomasse présente. Il faut savoir que les dégâts sont aussi importants en feuillus qu’en résineux. L’élément capital est la biomasse sur pied, la hauteur des fûts. C’est pour cela que l’entretien des forêts joue énormément ! Aucune technique de reconstitution de la forêt ne peut garantir qu’une tempête n’aura pas d’impact : nous cherchons à minimiser l’impact négatif.

Concernant l’augmentation des températures, y a-t-il des espèces à privilégier ?
J.L.H. : On constate une « remontée » des essences forestières vers le nord de l’Europe ; c’est le cas du hêtre par exemple. Pour adapter les forêts, et éviter les dépérissements, nous favorisons une régénération plus fréquente, qui permet de faire s’exprimer les gènes les mieux appropriés. Dans certains cas, nous favorisons la mise en place d’essences plus résistantes aux nouvelles conditions climatiques : en Normandie par exemple, du chêne à la place du traditionnel hêtre. Mais il est vrai que nous évitons de planter des essences totalement exotiques, et le mélange des espèces est désormais privilégié.

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