« C’est une démarche inédite », affirme fièrement Michel Lacoste, le président du Conseil national des appellations d’origine laitières (Cnaol). Alors que les AOP laitières, qui représentent 15 % du lait français, se sont trouvées très fragilisées par la crise sanitaire, le projet d’« AOP laitières durables », présenté lors de l’assemblée générale du Cnaol le 24 septembre, devrait permettre de revaloriser les filières. « Nous nous sommes rendu compte de l’importance des mouvements de soutien, de la part des citoyens notamment, et nous aimerions répondre davantage à leurs attentes. » Le Cnaol prévoit ainsi qu’en 2030, des mesures de durabilité soient intégrées aux décrets des appellations d’origine, qui « sont les cartes d’identité des AOP », insiste Michel Lacoste.
18 objectifs de durabilité communs à toutes les AOP laitières
Bien que la volonté de répondre aux attentes sociétales soit présente au sein des AOP laitières depuis longtemps d’après Michel Lacoste, le projet d’AOP laitière durable a été validé au printemps 2020, lors de la dernière assemblée générale. Le Cnaol a ensuite fixé, le mois dernier, 18 objectifs communs à toutes les appellations, répondant aux trois piliers du développement durable (environnemental, économique et social). Le 24 septembre, l’assemblée générale a permis de les présenter, afin de que chaque appellation puisse maintenant définir des mesures propres pour y répondre. Pour Michel Lacoste, cette démarche territoriale est fondamentale. « Les AOP laitières ont toujours été opposées à des mesures transversales, qui ne correspondraient pas aux réalités de chaque territoire », explique-t-il. Certaines AOP ont pris les devants, et devraient communiquer leur plan d’action dès la semaine prochaine.
Valoriser des pratiques déjà existantes
Concrètement, une telle modification du décret des appellations nécessite un changement du cahier des charges. Mais, comme Michel Lacoste tient à le rappeler, « l’objectif est de traduire dans les appellations toutes les démarches présentes historiquement sur chaque territoire ». Le projet s’appuie ainsi sur les externalités positives déjà effectives des AOP, de la production à la transformation, mais non valorisées. Cependant, elle permettra aussi de généraliser les « pratiques durables » à l’échelle des territoires, là où ça n’était pas le cas.
Changements de réglementation nécessaires
Alors qu’il existe de plus en plus de démarches de segmentation concernant la durabilité, pour les AOP, un tel affichage n’était pas gagné d’avance. « Dans le cadre de la réglementation européenne, une AOP ne peut pas garantir autre chose qu’une origine géographique et des règles affectant les propriétés organoleptiques du produit », détaille Michel Lacoste. Cependant, avec l’aide de l’Organisation pour un Réseau International d’Indications Géographiques (OriGIn), au rayonnement continental, le Cnaol a lancé une discussion avec les services de la Commission européenne, afin d’obtenir l’autorisation d’une modification des décrets. Actuellement en cours de rédaction, ces derniers sont attendus dans la prochaine Pac.
Les étapes à venir concernent la validation des décrets par l’Union Européenne, ainsi qu’une promotion forte auprès des consommateurs. Pour cela, Michel Lacoste compte sur le soutien de l’Etat. « Nous espérons obtenir un accompagnement des pouvoirs publics, pour renforcer la logique de l’AOP et empêcher de l’affaiblir par l’ajout d’autres labels de durabilité déconnectés des territoires. »