Les sols français livrent leurs secrets

22 novembre 2011 - La rédaction 
Après 10 ans de travaux, le Groupement d'intérêt scientifique (Gis) Sol* dresse un premier bilan de l'état des sols de France, tant vis-à-vis de leur fertilité, de leur contamination que des services environnementaux rendus.

Qui se cache derrière cette définition : « Une ressource essentielle, non renouvelable qui rend des services multiples »? Ce sont les sols évidemment, au cœur d'enjeux planétaires comme la sécurité alimentaire, le changement climatique, la disponibilité en eau de qualité, la production de bioénergie ou la biodiversité. C'est dire combien était attendu le premier bilan de l'état des sols en France établi après dix ans de travaux par le Groupement d'intérêt scientifique (Gis) Sol et présenté le 18 novembre.

« L'état des sols français est plutôt satisfaisant », a fait remarquer d'emblée Dominique Arrouays de l'unité Infosol-Inra d'Orléans, en présentant le rapport, le 18 novembre.

Des teneurs faibles pour la majorité des contaminants

Ce qui va bien : les sols ne présentent pas d'évolution de leur acidité, ils ne montrent pas non plus de baisse mesurable de leurs teneurs en potassium, malgré une diminution importante des apports minéraux humains via la fertilisation. L'analyse réalisée sur l'ADN microbien des sols, tant en quantité qu'en biodiversité, montre qu'aucun sol ne paraît stérilisé. Enfin, la majorité d'entre eux présente des teneurs en métaux lourds comme le plomb, le cadmium et le zinc « plutôt faibles ».

Mais, souligne Dominique Arrouays, « les contaminations dépassent les zones urbaines et industrielles pour gagner des auréoles plus larges comme en région parisienne et dans le Nord-Pas-de-Calais ». D'autres contaminants sont plus franchement pointés du doigt : « On a pu mettre en évidence que le lindane, un insecticide interdit depuis 1998, est présent dans tous les sols, y compris là où il n'a pas été épandu », explique Dominique Arrouays. Le cas de la chlordécone dans les sols de bananeraies des Antilles est également jugé inquiétant par le chercheur.

Les dangers de la bétonisation et de l'érosion

D'autres dangers guettent les sols français. En premier lieu, la bétonisation. L'agriculture est la principale victime de l'artificialisation des sols, elle perd ainsi l'équivalent d'un département tous les sept ans. L'érosion des sols est également menaçante car susceptible de remettre en cause la durabilité à long terme de certains agro-écosystèmes. Elle touche aujourd'hui 17 % du territoire.

Au plan de la fertilité chimique, ce sont les faibles teneurs en phosphore dans la grande majorité du territoire qui inquiètent. A l'inverse, l'augmentation des teneurs dans les régions d'élevage, telle que la Bretagne ou le Nord-Pas-de-Calais, est préoccupante en raison de son impact sur la qualité des eaux et sur l'eutrophisation des milieux. « Cette juxtaposition de situations d'excédents et d'insuffisances potentielles soulève la question d'une meilleure valorisation des effluents d'élevage pour corriger les unes et les autres », explique Dominique Arrouays.

L'incertitude du changement climatique

De nombreuses incertitudes et interrogations dues à un manque de connaissances sur les sols subsistent encore. Elles portent par exemple sur le stockage du carbone et son devenir sous l'effet du changement climatique. 3,2 milliards de tonnes de carbone sont stockées sous nos pieds. « A 10 € la tonne de carbone et si l'on considère que 40% se trouve dans les 30 premiers centimètres travaillés, les agriculteurs détiennent avec leurs champs l'équivalent du budget annuel de la France », relève non sans humour Dominique Arrouays. « Il faut considérer les sols comme un patrimoine de l'humanité » plaide le chercheur et de citer Antoine de Saint Exupéry en guise d'avertissement : « On n'hérite pas la terre de nos ancêtres, on l'emprunte à nos enfants ».

* Crée en 2001, le Gis Sol regroupe  deux ministères (agriculture et environnement, l'Inra, l'Ird, l'Ademe, l'Inventaire forestier national. Pour en savoir plus : www.gissol.fr.

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