Ce sont sans doute les conséquences fâcheuses des remembrements successifs liés au passage de deux autoroutes sur son exploitation, il y a une quinzaine d’années, qui ont donné à Jean-Jacques Mennesson, agriculteur à Grand-Laviers dans la Somme, l’essentiel de sa motivation actuelle.
La perte importante de surface agricole et les problèmes d’érosion suite au changement de sens du parcellaire l’ont en effet progressivement conduit à une profonde réflexion sur l’orientation à donner à son exploitation de quelque 180 ha.
Des normes environnementales respectées
Il décide alors d’atténuer les effets négatifs de ces remembrements par un redécoupage du parcellaire, par la plantation de haies et par la mise en place de bandes enherbées au bord des champs pour limiter l’érosion et faire barrage aux éventuelles dispersions de produits de traitement. Sur la lancée, Jean-Jacques Mennesson en profite pour adapter son mode de fonctionnement : mise aux normes du local de stockage des produits de traitement, construction d’un bac de rétention pour le stockage de l’engrais azoté liquide, récupération et traitement des effluents (liquides résiduels) de pulvérisation, enregistrement méticuleux des interventions culturales en vue de la traçabilité, amélioration de la sécurité du travail… Et de rencontres en coïncidences, il devient membre du réseau de fermes Agéris, créé par le fabricant de produits de protection des plantes Syngenta Agro (lire encadré).
Car Jean-Jacques Mennesson n’en a pas pour autant perdu la foi dans l’agriculture dite “productiviste”. Il est même convaincu que l’agriculture “raisonnée” n’est pas un concept novateur, tout en admettant que certaines pratiques du passé ont parfois pu donner lieu à quelques dérives regrettables.
Rétablir certaines vérités sur l’agriculture
Lassé de voir l’agriculture montrée du doigt et un peu irrité par une certaine incapacité de la profession à communiquer auprès du grand public, il a donc entrepris, en partenariat avec Syngenta, de montrer, d’analyser, d’expliquer, d’expérimenter, d’informer, de sécuriser. Non pas pour tenter d’exonérer l’agriculture de ses responsabilités, et encore moins pour se poser en donneur de leçons vis-à-vis de ses collègues, mais essentiellement par souci de rétablir certaines vérités, trop souvent caricaturées ou même travesties par la presse générale, la grande distribution et d’autres lobbies. En résumé, pour faire en sorte que l’objectivité et la réalité scientifique prennent le dessus sur un certain obscurantisme ambiant.
Quantité et qualité ne sont pas antagonistes
Bref, Jean-Jacques Mennesson entend faire la démonstration que, pour autant que l’on veuille bien s’en donner la peine, l’agriculture productiviste n’est pas antinomique des attentes de la société en matière d’alimentation et d’environnement. “Au contraire, quantité et qualité ne sont pas antagonistes, affirme-t-il, mais il est important de montrer que la qualité a un coût, qui ne peut être supportable pour le consommateur que si on lui associe la quantité”.
Ce qui rend incontournable le recours aux produits de traitement pour la protection des cultures. “Les fabricants de produits de traitement des plantes et les agriculteurs ont le même problème de fond. Il est donc nécessaire de travailler en concertation et de montrer au public que la production des matières actives contenues dans les produits évolue dans le bon sens. Pour preuve, de nombreuses molécules sont aujourd’hui issues du milieu naturel”, explique encore l’agriculteur.
Travail bien fait
Un inventaire précis de la faune et de la flore a donc été réalisé sur l’ensemble de l’exploitation, et fera l’objet d’observations régulières. Un point auquel tient particulièrement Jean-Jacques Mennesson, qui est aussi chasseur. Mais ses premières observations le confortent dans ses convictions : “Les haies et les bandes enherbées abritent de nombreuses espèces animales et végétales qu’on n’était plus habitué à voir et les abeilles se portent bien”.
De même l’analyse des résidus de produits de traitement dans les productions issues de l’exploitation est effectuée en vue de contrôler leur qualité sanitaire et de rassurer les filières de transformation et de commercialisation. L’occasion pour Jean-Jacques Mennesson de constater que, curieusement, certains distributeurs s’intéressent plus à la méthode qu’au résultat…
“Aujourd’hui, mon appartenance au réseau Agéris me permet de remettre l’observation au centre de mes décisions. J’ai la sensation de mieux faire mon travail de paysan qu’il y a 20 ans, sans toutefois avoir renoncé à aucune de mes convictions”, estime l’agriculteur avec satisfaction.
Fermes Agéris
Savoir ce que l’on fait, pourquoi on le fait et le faire savoir
Jean-Jacques Mennesson n’a pas la prétention d’être à la tête d’une ferme pilote. Tout au plus a-t-il la sensation d’avoir quelques longueurs d’avance sur beaucoup d’autres en matière de conformité à la réglementation actuelle et à venir. Mais sa réelle mission, en partenariat avec Syngenta, est d’ordre pédagogique. Plus de 1 000 personnes sont ainsi accueillies chaque année dans son exploitation : des enfants des écoles jusqu’au Préfet, en passant par la presse générale, les transformateurs (malteurs, meuniers…), la grande distribution ou encore les agriculteurs et le grand public. Cette expérience a le mérite de jouer la transparence et de s’appuyer sur un état des lieux et des observations scientifiques. “Mais il n’est pas facile d’être juge et partie et de convaincre dans un domaine où le discours ambiant trouve un écho plus que favorable dans l’opinion publique”, constate Jean-Jacques Mennesson.