« À titre expérimental, pour une durée de deux ans, les gestionnaires, publics ou privés, des services de restauration collective scolaire sont tenus de proposer, au moins une fois par semaine, un menu végétarien ». Inscrite dans l’article 24 de la loi Egalim, cette mesure, qui fait encore réagir trois ans plus tard, arrive bientôt à son terme. A cette occasion, le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) a diffusé, le 15 juin, son rapport sur la mise en œuvre de cette expérimentation. Conclusion : « en dépit de freins assez puissants et d’un contexte sanitaire exceptionnellement contraignant, la mise en œuvre du menu végétarien hebdomadaire à la cantine bénéficie de plusieurs leviers qui ont permis un démarrage effectif même s’il n’est pas intégral ». Actuellement, dans 63 % des collectivités, 71 % des enfants ont un repas végétarien hebdomadaire.
Des réticences initiales
Le rapport souligne les freins rencontrés lors du lancement de l’expérimentation, liés notamment à la réticence et l’impréparation de nombreux opérateurs, et au conditions d’approvisionnement, « le tout aggravé par un contexte sanitaire malvenu ». Le CGAAER note cependant que ces blocages ont été peu à peu été dépassés, grâce à une opinion publique de plus en plus favorable au menu végétarien, à la mobilisation des responsables d’établissements et des chefs de cantine, ou à la multiplication de dispositifs d’accompagnement, comme des guides ou des fonds débloqués dans le cadre du Plan de relance.
Appel à écouter les “mises en garde” du terrain
Néanmoins, les auteurs du rapport alertent sur plusieurs difficultés rencontrées sur le terrain. « Si la plupart des 35 000 communes concernées ont joué le jeu, en dépit des réticences initiales de certaines, plus de la moitié d’entre elles ont éprouvé des difficultés significatives (définition du menu végétarien, formation des personnels, réorganisation, réticences du personnel) qui ne sont pas toutes surmontées. » Si le menu végétarien a su se faire sa place, permettant « d’envisager sa pérennisation avec une certaine confiance », le rapport appelle à bien prendre en compte « les mises en garde exprimées par élus et gestionnaires, quant au risque de trop charger la barque en augmentant à nouveau la part du végétal dans les menus, comme certaines organisations en font déjà la demande ». Le rapport souligne ainsi le fait que, selon une enquête de l’AMF, réalisée auprès de 28 800 communes disposant d’une école primaire, 78 % sont à ce jour hostiles à une pérennisation de la mesure, compte tenu des efforts ayant déjà du être fournis.
Des résultats à compléter
Par ailleurs, les résultats doivent encore être approfondis sur plusieurs sujets, notamment les effets de la mesure sur la fréquentation, le coût et le gaspillage. De même, si les bénéfices du repas végétarien hebdomadaire « ne présentent que des avantages au titre de la diversification des sources de protéines, dès lors que les besoins nutritionnels des enfants sont bien couverts », les avis sont encore mitigés en ce qui concerne l’augmentation de la fréquence de ce menu. Un avis de l’Anses à ce sujet, prévu pour septembre 2021, est très attendu. « Pour dépassionner l’enjeu et remettre l’alimentation des élèves au centre du processus, il est suggéré de privilégier une dynamique culinaire et gastronomique : promouvoir les végétaux sans stigmatiser les produits animaux », conclut le rapport.
Plusieurs recommandations
Pour aller plus loin, le document formule plusieurs recommandations, à commencer par la poursuite de l’expérimentation en l’assortissant de mesures de suivi et de contrôle ; former les chefs et revaloriser leur statut ; faciliter l’approvisionnement en produits végétaux de qualité ; conforter l’acceptabilité de la mesure et en renforcer l’accompagnement pédagogique auprès des élèves, de leurs parents et des personnels concernés ; envisager l’extension du menu végétarien hebdomadaire à d’autres domaines de la restauration collective.
Les missions du CGAAER
- identifier les freins et leviers à la mise en place du menu végétarien hebdomadaire ;
- analyser l’impact sur le gaspillage alimentaire, la fréquentation et le coût des repas ;
- évaluer l’impact sur la diversité et l’équilibre des repas servis et leur qualité nutritionnelle ;
- formuler des propositions argumentées quant aux suites qui pourraient être données à l’expérimentation.