Milan 2015 : pourquoi l’huile de palme fait-elle tant parler d’elle ?

25 juin 2015 - La rédaction 
L'huile de palme est-elle aussi nuisible pour la santé et l'environnement que ce que laissent entendre de nombreuses campagnes d'ONG environnementalistes ? Patrice Levang, auteur de « Palmier à huile et enjeux de développement », nous indique que les rendements de cette plante permettent de largement limiter sa plantation, et donc la déforestation. Il met également en avant les premières solutions mises en place pour intégrer les intérêts des populations locales dans les logiques de développement des agro-industries.

Le palmier à huile fait l'objet de nombreuses controverses médiatisées. Décrit comme une plante aux rendements miraculeux pour les industriels et les populations qui l'exploitent, beaucoup d'ONG environnementalistes l'accusent d'être une plante détruisant les forêts tropicales. Pour la dixième conférence des Mercredis du Pavillon France à Milan, Patrice Levang, directeur de recherche à l'Institut de recherche pour le développement, met en lumière les véritables débats autour de l'huile de palme.

Le palmier à huile, ou Elaeis guineensis, est une herbe géante largement cultivée pour ses fruits riches en huile à usage alimentaire, mais qui produit également du vin de palme ou des matériaux pour de l'artisanat locale. L'huile de palme contient des acides gras saturés lui permettant d'être solide à température ambiante et lui offrant des caractéristiques gustatives similaires au beurre.

Dix fois plus d'huile que le soja à surface égale

Les rendements du palmier à huile sont quatre à huit fois supérieurs à ceux de ses concurrents oléagineux (soja, colza et tournesol). Pour une même quantité d'huile, le soja aurait besoin d'être cultivé sur une surface dix fois plus importante. Ne survivant pas à moins de 15°C, le palmier ne peut pas être cultivé en dehors des zones intertropicales. Il est indéniable que son expansion en Malaisie et en Indonésie s'est faite au détriment de la forêt tropicale primaire, les zones de forêt vierges étant idéales pour sa culture.

Un rendement important qui permet de limiter les surfaces cultivées
« S'il faut convertir dix fois moins de forêt pour produire l'huile de palme par rapport au soja, ça serait une erreur de ne pas privilégier le palmier », souligne Patrice Levang. Pour qui il va falloir continuer à en assurer la production tout en respectant l'environnement et les droits des populations locales en intégrant le développement local avec celui des agro industries
 
40% de la palmeraie mondiale est aujourd'hui aux mains de petits planteurs. Cela permet de réduire la pauvreté des populations rurales au Sud et diminue l'impact environnemental des palmeraies. Les paysans n'ayant pas les mêmes logiques de plantation que les industriels, les plantations de petits villages conservent une diversité de productions vivrières ainsi que des zones de forêts.

Problématiques de développement local et premières solutions

Une culture durable du palmier à huile limitant la déforestation reste toutefois difficile pour les petits planteurs. En Indonésie, il existe des terrains pour planter sans couper le moindre arbre de forêt. Mais, aujourd'hui, installer une palmeraie sur une friche entraîne un surcoût par rapport à la déforestation. Les terrains étant moins riches et plus enherbés, les coûts de fertilisation et de désherbage sont élevés. Dans le cas d'une déforestation, une grande partie des frais de plantations peut être prise en charge par les paysans en récupérant le bois.
 
La recherche a permis de mettre au point des espèces résistantes à différentes maladies avec des rendements toujours importants de l'ordre de 4 à 6 tonnes d'huile par hectare. De tels rendements nécessitent toutefois une fertilisation massive, ce qui est difficile à concevoir pour des paysans lorsqu'ils payent déjà le prix fort pour obtenir des variétés sélectionnées.

Depuis 2004, la plupart des industriels ont mis en place l'initiative RSPO pour « round table for sustainable palm oil » ou « table ronde pour une huile de palme durable ». Ces acteurs ont mis en place toute une série de critères pour une bonne gestion des palmeraies, allant des aspects environnementaux à des problématiques sociales, comme la prévention des conflits fonciers ou la préservation de la santé des paysans. Aujourd'hui, plusieurs centaines de producteurs ont signés la charte RSPO et assurent une traçabilité en imposant le logo « huile certifiée RSPO » sur leurs produits.

 
L'huile de palme doit trouver sa place dans une alimentation diversifiée
Pour Patrice Levang, beaucoup de contre-vérités sont répandues sur les effets de l'huile de palme sur la santé. Il rappelle qu'en Europe, un à deux kilogrammes d'huile de palme sont consommés par personne et par an, contre vingt kilogrammes de beurre et bien plus encore pour les charcuteries et autres graisses animales riches en acides gras saturés et facteurs de cholestérol. 
 
S'il paraît aujourd'hui peu probable que l'on se passe des acides gras saturés dans nos pratiques alimentaires, le chercheur souligne l'importance d'une alimentation diversifiée et sans excès. « C'est moins l'huile de palme que les habitudes alimentaires qui sont responsables des problèmes de santé dans les pays du Nord. » De plus, en diminuant la part d'acides gras saturés d'origine naturelle, on prend le risque que les industriels aient recours à l'hydrogénation pour saturer des huiles qui ne le sont pas. Cela produit des acides gras “trans”, dont la dangerosité pour la santé humaine a été largement prouvée.

Générique réalisé par Alimentation Générale

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