OGM – “Clarifier sans obliger”

7 avril 2006 - La rédaction 
Pascal a récolté en 2005 dix hectares de maïs OGM, dans le cadre d’un programme coordonné par l’Association des producteurs de maïs. Fort de son expérience, il prône une clarification des règles de coexistence entre cultures conventionnelles et OGM, mais s’oppose à un encadrement strict. “ Les agriculteurs qui commettent une faute doivent assumer ”, estime-t-il.

Vous ne connaîtrez pas son nom. Pascal, 28 ans, installé depuis trois ans dans la vallée de la Garonne, à proximité de Toulouse, exploite une ferme de 95 ha. Il n’accepte de livrer son expérience de planteur d’OGM que sous couvert d’anonymat. “Compte tenu du contexte tendu de l’été 2005”, explique-t-il. Il a en mémoire quelques violences avec les commandos anti-OGM. “Je suis producteur, reprend Pascal. Je ne veux pas verser dans la polémique. Tout ce que je souhaite, c’est communiquer sur ce que je fais. Ce qui est d’ailleurs un des objectifs du programme PACB de l’an dernier.”

Pascal, producteur de maïs, face au projet de loi sur les OGM : « Le flou actuel ne profite à personne. »

Dix hectares d’OGM en 2005

Le PACB, pour programme d’accompagnement des cultures issues des biotechnologies, est coordonné par l’AGPM, Association générale des producteurs de maïs. Il a totalisé 80 hectares de maïs OGM, répartis sur 17 exploitations. Ce qui ne représente qu’une petite partie des plus de mille hectares cultivés l’an dernier. Le gros des surfaces a été réalisé à l’initiative d’un semencier et a fait également l’objet d’un cahier des charges.

De formation ingénieur agricole, de l’école de Purpan, Pascal affiche une curiosité sans faille pour tout ce qui est innovation. Il est donc partant lorsque l’AGPM met en place en 2005 son programme d’observation des maïs OGM en condition de plein champ, et non plus sur des parcelles d’expérimentation. C’est la première fois qu’il met en terre du maïs OGM. Le cadre proposé par l’association des producteurs lui paraît sécurisant : “Nous respectons un cahier des charges très concret et le suivi est réalisé par un ingénieur de l’AGPM, du semis à la mise en marché”. Car au-delà de la récolte de dix hectares, sont également assurés la traçabilité du transport, du séchage, du stockage puis l’écoulement de la production vers les fabricants d’aliments du bétail espagnols, comme tous les autres maïs OGM produits dans le Sud-Ouest l’an dernier, à un prix identique à celui du maïs conventionnel.
L’expérience 2005 a été concluante pour Pascal. Il envisage donc de la renouveler en 2006 sur une surface équivalente. Et observe avec la plus grande attention les débats autour du projet de loi sur les OGM.
“Les règles de coexistence doivent être clairement définies. Le flou actuel ne profite à personne”, considère Pascal, pour qui le développement de la culture d’OGM ne pourra se faire que sur la base de cahiers des charges très stricts.
Pour autant, il est fermement opposé au fait de déclarer ses parcelles : “Nous sommes sur des maïs dont les événements [caractéristiques OGM, ndlr] sont homologués. À partir du moment où les pratiques culturales respectent le cadre fixé, en vertu de quoi devrions-nous déclarer les surfaces concernées en mairie, à la direction départementale de l’Agriculture et à plus forte raison au grand public ?” La création d’un fonds alimenté par une taxe à l’hectare de culture OGM, comme le principe de souscrire une assurance, ne trouve pas davantage grâce à ses yeux. “Le maïs est une culture parfaitement connue. Sur un plan technique, il n’y a pas de problème. Décaler deux maïs en fonction de leur date de floraison, par exemple, ne pose pas de difficulté. Dès lors que le cahier des charges est respecté par l’agriculteur, qu’il y a contrôle au stade de la récolte puis au niveau des organismes stockeurs, les responsabilités sont clairement établies. Nous sommes sur une culture entre guillemets un peu spéciale, ce qui justifie les règles d’étiquetage et de traçabilité, et la mise en place de deux filières parfaitement séparées. Mais, pour le reste, ma responsabilité est engagée à chaque fois que je cultive. Si, par exemple, un herbicide se déporte parce que je n’ai pas pris en compte le vent, j’assume ma responsabilité par rapport aux éventuels dégâts. Si un producteur de maïs biologique est lésé par une fécondation croisée avec du maïs OGM, il est normal qu’il soit indemnisé. Mais il existe déjà un cadre en responsabilité civile. Pourquoi en créer un autre ?”
À la fermeté des règles et des contrôles entourant la culture d’OGM, Pascal met en parallèle une responsabilisation des exploitants : “Aux agriculteurs qui ont commis une faute de l’assumer”.

Repères techniques

L’exploitation

95 ha, en vallée de la Garonne, dont 20 % de maïs irrigué et 80 % en alternance blé dur/tournesol et colza.
Zone périurbaine, parcellaire très morcelé et terres hétérogènes.

Les parcelles de maïs

OGM : 10 ha semés le 30 avril avec un maïs Bt autorisé résistant à la pyrale et la sésamie ; surcoût de la semence OGM, 45 /ha ; floraison : autour du 14 juillet ; désherbage classique ; aucun apport insecticide.
Conventionnel : 5 ha semés à la même date, floraison identique ; une insecticide pyréthrinoïde contre la 1re génération de sésamie (coût, 40 /ha).
Rendement : conventionnel, 110 q/ha ; OGM, 115 q/ha.

Le cahier des charges OGM débute par le choix des parcelles, localisées en fonction notamment des vents dominants et de la présence à proximité de maïs conventionnel. Une barrière pollinique de 10 mètres, soit douze rangs de maïs conventionnel, a été implantée tout autour de la parcelle OGM. Le comptage par l’ingénieur AGPM a mis en évidence une pollinisation croisée au sein de la barrière pollinique mais une absence totale sur les parcelles jouxtant en maïs conventionnel. Le différentiel de rendement de 5 quintaux/ha, en faveur du maïs OGM s’explique pour Pascal par le contrôle total des ravageurs.

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