Ré-ennoblir le métier de paysan

20 février 2006 - La rédaction 
Gilles Thevenet est président du conseil scientifique de Farre. Il a participé à chacune des étapes du Forum de l’agriculture raisonnée respectueuse de l’environnement, puis à l’émergence du référentiel agriculture raisonnée.

Référence environnement : 1 200 exploitations sont à ce jour qualifiées agriculture raisonnée. Un bon score ?

Gilles Thevenet : C’est à la fois peu et beaucoup. Peu, au regard de l’objectif de 30 % d’exploitations qualifiées à l’horizon 2008. Mais beaucoup si l’on tient compte du fait que la qualification est arrivée au moment où se met en place la conditionnalité des aides. La volonté des différentes composantes du monde agricole de booster la démarche est un facteur encourageant et qui contribuera à donner un deuxième souffle. Même si ce n’est pas gagné.

Gilles Thevenet est président du conseil scientifique de Farre. Il a participé à chacune des étapes du Forum de l’agriculture raisonnée respectueuse de l’environnement, puis à l’émergence du référentiel agriculture raisonnée.
R.E. : Mais, justement, quel est l’intérêt de l’agriculteur à entrer dans une démarche de qualification ?
G.T. : Son intérêt est double : à la fois dans son métier et vis-à-vis des citoyens. Dans son métier, le référentiel répond à toute une série de demandes des fournisseurs de l’agriculture et de ses clients en termes de traçabilité, d’hygiène. Vis-à-vis des citoyens, la reconnaissance de l’ensemble des bonnes pratiques observées sur la ferme par un organisme tiers est importante. Même si cela ne se traduit pas encore en monnaies sonnantes et trébuchantes !

Certes, le raisonnement des interventions au plus près des besoins de la plante peut apporter des économies de charges. Mais les agriculteurs ne découvrent évidemment pas l’ajustement des doses avec la qualification. Je pense que ces gains se situent plus à terme, soit grâce à une valorisation des produits issus des exploitations qualifiées, soit via les services rendus à la société. Il faut que la différenciation soit perceptible pour que les consommateurs, en retour, acceptent d’envoyer un signal. Ils doivent eux aussi assumer leur part de responsabilité.

R.E. : En cas de crise, et l’on pense à la grippe aviaire en France, l’exploitation qualifiée dispose-t-elle d’atouts supplémentaires ?

G.T. : Oui, dans le sens où l’agriculteur a la certitude d’être au mieux en termes de sécurité alimentaire, en complément bien sûr des différentes mesures incluses dans le paquet hygiène. Mais c’est un peu comme une assurance voiture : on la souscrit dans l’espoir de ne jamais avoir à s’en servir !

R.E. : Farre avait placé son colloque, le 10 janvier 2006 sous la bannière de la biodiversité ? Pourquoi ce choix ?

G.T. : Le référentiel pose les bases minimales en termes de respect de la biodiversité, et je trouve significatif que ce soit affiché en tant que tel. Il est d’ailleurs important que la biodiversité soit développée dans la partie régionale du référentiel. Cinq régions se sont déjà saisies de cette problématique à ce jour : l’Ile-de-France, les Poitou-Charentes, la Picardie, le Nord-Pas-de-Calais, les Pays de Loire. Elles ont introduit des mesures spécifiques comme la connaissance des écosystèmes, la préservation des haies…

Cela constitue, me semble-t-il, un excellent moyen de valoriser le rôle de l’agriculture. Et son image auprès du grand public.

R.E. : Mais être qualifié n’implique pas forcément d’être un bon communicant.

G.T. : Non, bien sûr. Mais rien n’empêche les agriculteurs qualifiés qui ont envie de prolonger leur démarche en le faisant savoir de rejoindre le réseau Farre. Nous ne sommes pas le Forum de l’agriculture raisonnée respectueuse de l’environnement pour rien !

Un respect qui passe aussi par celui des hommes. Je suis parfois agacé de voir la façon dont tout un chacun entend donner des leçons aux agriculteurs. Ils font un métier au vu et au su de tout le monde. Et ils le font bien dans leur immense majorité. Parmi les missions de Farre, il en est une qui me semble essentielle : que les hommes et les femmes qui sont agriculteurs en soient fiers, qu’il y ait un ré-ennoblissement du métier de paysan. Y compris pour aider les jeunes à faire le choix de l’agriculture.

Laisser un commentaire

Recevoir la newsletter

Restez informé en vous abonnant gratuitement à la newsletter