Tir groupé pour se qualifier agriculture raisonnée

3 mai 2006 - La rédaction 
Les 23 agriculteurs composant le conseil d’administration de la ccopérative Valfrance ont décidé, à l’unanimité, de faire qualifier leur exploitation agriculture raisonnée. Parmi eux, Christophe Grison, producteur sur 210 ha dans l’Oise, a relevé le défi et a reçu le 4 avril dernier le papier officiel de qualification. Il collabore également avec un technico-commercial de la coopérative pour sensibiliser d’autres agriculteurs. Témoignage.

Producteur installé sur 210 ha à Mareuil-sur-Ourcq (Oise), Christophe Grison est actif au sein du conseil d’administration de la coopérative Valfrance à qui il livre l’ensemble de sa production. Il faisait partie du voyage organisé en Hongrie en juin 2003, où les administrateurs avaient mis des mots sur l’orientation qu’ils souhaitaient prendre. Ils parlaient de “développement d’une agriculture durable”, de “communication” et “de proximité avec le consommateur”, et décidaient de s’engager dans le réseau Farre fin 2004 (Forum agriculture raisonnée respectueuse de l’environnement). Convaincus du besoin de transparence, les 23 membres du conseil d’administration ont alors choisi de se lancer dans la qualification agriculture raisonnée. Une décision votée à l’unanimité.

Christophe Grison (à gauche), en compagnie de Jean-Luc François et Philippe Boeda de Valfrance, a choisi de faire qualifier son exploitation agriculture raisonnée dans le cadre d’une démarche collective, convaincu que la transparence est une véritable stratégie d’entreprise

Totalement sécurisé

“Bien travailler, c’est bien de le dire, mais il faut le prouver”, estime Christophe Grison, convaincu que l’audit réalisé par un organisme indépendant permet d’apporter une preuve solide qu’il travaille en toute transparence. Déjà qualifié Quali’Terre, le producteur a été récemment audité pour la qualification agriculture raisonnée. Il vient d’ailleurs de recevoir l’attribution “officielle” datée du 4 avril 2006. Conformément aux exigences de traçabilité du référentiel, il enregistre toutes les interventions réalisées dans ses parcelles et conserve une trace de toutes les décisions prises. “Je suis équipé du nouvel outil Sireme proposé par Valfrance, explique Christophe Grison. Tous les soirs, je procède à l’enregistrement des données en connectant mon pocket PC à l’ordinateur afin d’avoir une trace du suivi technique et économique par parcelle et par culture.”
Membre actif du réseau Farre, Christophe Grison raisonne ses interventions, implante des cultures intermédiaires et pratique suivant les années le non-labour sur certaines de ses parcelles en pente afin de limiter l’érosion. Pour être en phase avec le référentiel, il a aussi effectué divers aménagements sur son exploitation. “Il était de ma responsabilité de prendre toutes les précautions nécessaires pour éviter tout risque pour l’homme et l’environnement”, annonce-t-il. En 2002, il a fait construire un bac de rétention pour les cuves d’engrais liquides. En décembre 2005, il s’est doté d’un nouveau local spécifique fermé à clé, où sont stockés les produits phytosanitaires. Les spécialités y sont rangées par type de culture et par famille afin d’éviter les mélanges. Isolé hors-gel, le local est entièrement carrelé et en pente pour diminuer les risques en cas de renversement de produits.

Communiquer auprès des agriculteurs

“Nous allons concentrer nos efforts sur la construction d’un local technique et d’une autre pièce qui accueillera la cuve à fioul, ajoute Christophe Grison. L’objectif étant d’avoir une zone totalement sécurisée.” Le producteur a également prévu de bétonner une zone pour le remplissage et le nettoyage de son pulvérisateur. Autre projet?: installer un phytobac en contrebas, en profitant de la pente naturelle. D’autres adaptations ont concerné les abords de son exploitation. “L’aménagement paysager est d’autant plus important que c’est l’image que nous véhiculons auprès des consommateurs, affirme l’exploitant pour qui communiquer sur son savoir-faire est l’un des axes prioritaires. Je reçois régulièrement des groupes pour les sensibiliser à l’agriculture raisonnée. Une occasion pour leur montrer que toutes les interventions réalisées sur mon exploitation sont réfléchies.”
Christophe Grison consacre aussi du temps pour communiquer et convaincre d’autres agriculteurs adhérents à la coopérative. Car outre faire qualifier les 23 administrateurs, le défi que s’est lancé Valfrance est d’entraîner dans cette démarche un maximum d’agriculteurs et d’obtenir 10 % de sa collecte en agriculture raisonnée. Lancé début 2004, le projet a démarré avec la mise en place de groupes d’échanges formés d’agriculteurs et de technico-commerciaux de la coopérative avec l’objectif d’atteindre 150 agriculteurs qualifiés à l’été 2006.

Le bac de rétention pour les cuves d’engrais liquides et le local phytos :
deux investissements pour la sécurité.

150 exploitations qualifiées

Plusieurs binômes se sont ainsi constitués. Chacun a animé des réunions d’information dans son secteur. “Chaque groupe, constitué d’une quinzaine d’agriculteurs, s’est réuni pour étudier ensemble le cahier des charges, reprendre point par point les grands thèmes du référentiel et emmener les producteurs vers la qualification”, explique Jean-Luc François, technico-commercial chez Valfrance, binôme de Christophe Grison dans cette action de communication auprès des adhérents. Le principal frein à la qualification

étant

l’appréhension de l’audit, la peur du contrôle, travailler à plusieurs sur une telle démarche a alors permis de lever certaines inquiétudes et de créer une réelle dynamique. Autre moyen mis en œuvre pour “dédramatiser” le contrôle?: la réalisation d’audits blancs par le technico de la coopérative (voir encadré ci-dessous).
Pour l’heure, 80 producteurs adhérents à Valfrance ont déjà obtenu la qualification agriculture raisonnée. Les semis de betterave ont marqué un arrêt, mais les audits devaient rapidement reprendre. “L’objectif de 150 exploitations qualifiées sera atteint”, estime Christophe Grison, qui remarque que de nouveaux agriculteurs sont désormais prêts à se lancer dans cette démarche globale de la gestion d’exploitation. Une démarche qui s’inscrit dans une véritable stratégie d’entreprise, comme le confirment les propos de Philippe Boeda, responsable développement chez Valfrance?: “Par cette démarche à grande échelle, nous voulions montrer et prouver la transparence de notre entreprise. Après avoir travaillé sur la qualité technique de notre marchandise (accent mis sur les variétés, le fractionnement de l’azote, etc.), après avoir mis en place une démarche qualité entre la coopérative et les industriels (Iso 9000, AgriConfiance, charte Arvalis), nous voulions désormais nous engager dans une démarche de transparence de l’exploitation à la coopérative.”

Un accompagnement technique plus précis

“Dans notre secteur, les producteurs étaient déjà sensibilisés au discours de qualité, de traçabilité et d’agriculture raisonnée”, indique Jean-Luc François, technico-commercial chez Valfrance, binôme de Christophe Grison engagé dans la démarche de “communication” sur l’agriculture raisonnée auprès des adhérents de la coopérative. Concrètement sur le terrain, il accompagne les agriculteurs dans cette démarche et se pose comme un interlocuteur privilégié qui apporte une expertise. “C’est une nouvelle fonction pour moi, explique-t-il. Avant le conseil était verbal et les agriculteurs souhaitaient en priorité connaître l’efficacité d’un produit. Désormais, il faut amener un conseil plus précis, plus technique, en justifiant les doses, avec davantage de données économiques, en ayant une connaissance parfaite des autorisations de mise en marché, etc.” Le volet réglementaire a en effet pris de l’importance. Conscient du besoin d’informations précises, Valfrance a d’ailleurs embauché une personne chargée de transmettre aux technico-commerciaux toutes les informations législatives et juridiques. Le rôle d’accompagnateur du technico se traduit aussi par la réalisation d’audits blancs. “Pour aider l’agriculteur dans cet exercice parfois difficile, je fais des préaudits en reprenant les points clés du référentiel”, indique Jean-Luc François, qui dans le cadre de la charte du conseil coopératif, prépare actuellement son dossier pour faire reconnaître ses compétences techniques.

Laisser un commentaire

Recevoir la newsletter

Restez informé en vous abonnant gratuitement à la newsletter