Les acteurs de la cosmétique veulent participer à la résilience de l’agriculture

2 avril 2024 - Solene Gueguen 
Lors d’une conférence à l’académie de l’Agriculture le 20 mars 2024, plusieurs entreprises de la cosmétique ont rappelé leur engagement pour des productions plus durables. Le maître mot ? Les pratiques agroécologiques de plus en plus mises en avant dans les exploitations partenaires de ce secteur.

« L’agriculture a un avenir en cosmétique si nous construisons ensemble des modèles résilients et robustes », affirme Hervé Plessix, directeur général de la Stéarinerie Dubois lors d’une conférence sur les enjeux agricoles dans le monde de la cosmétique, organisée par l’académie de l’Agriculture le 20 mars 2024. L’entreprise produisant des corps gras est revenue entre autres sur la culture de palme : « Elle est controversée pour ses impacts sur la biodiversité, mais les autres cultures telles que celles du soja ne sont pas forcément moins polluantes », précise le directeur général. Hervé Plessix explique qu’il faudrait mieux contrôler les cultures et la déforestation engendrée notamment avec la mise en place d’aide auprès des petits planteurs : « En Indonésie avec le projet Kaleka Mosaik Initiative, nous avons permis la restauration de biodiversité au sein de 91 hectares ». L’entreprise travaille également en parallèle avec le Cirad (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) sur un projet d’étude intitulé Esy Project, pour améliorer les rendements sur les petites exploitations de manière durable.

Vers une naturalité des produits de la cosmétique

Des soins de la peau au maquillage, en passant par les parfums, la cosmétique est un vaste domaine qui « participe au rayonnement de la France à l’exportation », souligne Amandine Goubert, directrice scientifique chez Cosmetic Valley. Patrick Choisy, directeur associé du pilotage de la recherche amont chez LVMH division beauté rappelle que de plus en plus de consommateurs de produits cosmétiques se questionnent sur la durabilité des productions et des produits : « L’orientation sur le long terme, c’est vraiment la naturalité, minimiser les impacts sur l’environnement et le recours à l’usage de produits phytosanitaires ». Pour répondre à cette demande, plusieurs pistes de travail ont été mises en avant par le groupe qui travaille notamment pour Dior ou encore Kenzo. « Nous voulons être en capacité de construire une agriculture qui respecte les limites planétaires établies en 2009 (voir encadré) », explique Patrick Choisy. Pour cela, l’agroécologie ou agriculture régénératrice est mise en avant par le directeur associé avec l’utilisation, notamment, de la faune aérienne et souterraine mais aussi le recours à une approche éco-systémique des cultures. « Aujourd’hui, dans nos plantations de betterave pour Dior, nous avons un indice de régénération (voir encadré) de 40/100, nous aimerions l’augmenter à 70/100 », indique Patrick Choisy.

Une agriculture qualifiée de « surconsommatrice » en eau

Une autre source de préoccupation pour la cosmétique est l’usage de l’eau, dont de nombreuses cultures en sont « surconsommatrices », affirment les intervenants. « Il y a un réel enjeu d’amélioration des structures agroécologiques, mais également d’accompagnement pour un travail moindre du sol ou un travail en agriculture verticale pour les cultures surconsommatrices », précise Patrick Choisy. Il ajoute par ailleurs que « le travail de myccorhization des rosiers pour les parfums donne de bons résultats en matière de consommation d’eau ». Les intervenants de la séance ont par ailleurs souhaité conclure en rappelant que la cosmétique est « en train de s’affranchir des produits animaux, [et qu’ils ne souhaitaient] pas faire machine arrière ».

Le monde de la cosmétique représente aujourd’hui 226 000 emplois et 23,4 milliards d’euros à l’exportation, ce qui en fait le second contributeur à la balance commerciale française.


Les limites planétaires ont été proposées par le Stockholm Resilience Centre. Elles définissent des seuils de processus biophysiques actuellement au nombre de 9, que l’humanité ne devrait pas dépasser pour assurer des conditions favorables à la vie sur Terre. Ce système permet une vision globale des risques planétaires. En 2023, 6 des 9 limites planétaire avaient déjà été dépassées (le réchauffement planétaire, intégrité de la biosphère, la modification de l’usage des sols, les cycles biogéochimiques de
l’azote et du phosphore, la pollution chimique et l’eau douce).

L’Indice de Régénération est l’outil qui permet d’évaluer les résultats des pratiques agricoles sur 3 niveaux agronomiques : sol, plante et paysage.

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